Il restera un ou deux journaux par pays

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Ceci n'est pas un titre provocateur, mais le résultat d'une réflexion nourrie d'observations et d'analyses. En 2011, Ignacio Ramonet, directeur de l'édition espagnole du Monde diplomatique, à l' occasion d'un entretien avec un journaliste du Soir, lâchait – sans provocation aucune – cette phrase : « Il restera un ou deux journaux par pays ». Nous voici 7 ans plus tard et même si l'heure du final count down n'a pas encore sonné, le constat est d'autant plus vrai. Le journal en tant que média de masse a vécu. Rien de très précis sur la fin des dinosaures, mais le constat est là. De leur suprématie il ne reste aujourd'hui que quelques lointains cousins, tels le crocodile ou le varan. Que restera-t-il des parcs de quotidiens nationaux dans cinq ans ? Un ou deux par pays ? La Belgique étant une fédération, confédérée à tous ses échelons, nous aurons sans doute la chance de pouvoir compter sur trois titres de chaque côté d'une frontière linguistique savamment entretenue par le savoir-faire de nos mandataires politiques. Reste à voir qui écrasera l'autre, comme un fichier informatique qui efface négligemment sa version précédente ?
Pour le moment, les regards convergent vers L'Avenir, quotidien régional qui depuis des années n'a pas démérité. Grâce à sa maison mère Nethys, il a bien des cousins français, La Provence et Nice Matin, mais ils ne lui sont d'aucune utilité dans la problématique actuelle. Le voilà de plus contraint de couper son cordon ombilical avec l’imprimerie du groupe Mediahuis. Il est par ailleurs le cul entre deux chaises quant à un éventuel mariage avec l'un des deux groupes de presse francophone du pays, à savoir IPM ou Rossel.
Le premier, éditeur de LLB et de la DH, doit opérer un montage financier pour séduire la Namuroise, avec qui il prétend avoir des atomes crochus. Le second, déjà en chemise au niveau commercial avec les Editions de L'Avenir à travers Mag Advertising, offre un potentiel au niveau impression et synergies publicitaires. Volet éditorial, L'Avenir a tout à craindre d'une relation en dessous de la ceinture avec sa consœur Sud Presse. Pour Rossel, si une telle opération se concrétise, le groupe risque de se voir taxé d'abus de position dominante. Mais quand on aime, on ne compte pas... Quant à fondre L'Avenir dans l'offre digitale de VOO, on est ici dans le registre de l'expérimental avec tous les risques que cela comporte..
En marge de ces scénarios, il est évident que l'équation économique digère mal la présence de six quotidiens francophones, côté sud du pays, et de 7 côté nord, les projections actuelles conduiront d'une manière ou d'une autre à une réduction de l'offre de journaux. La seule question étant finalement : quand ?

Philippe Warzée - directeur éditorial de PUB

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