À quoi rêvent les algorithmes?*

ON HIS MIND_Hugues ReyEn 112 pages, Dominique Cardon, sociologue au Laboratoire des usages d’Orange Labs et professeur associé à l’université de Marne-la-Vallée (LATTS), montre comment ces nouvelles techniques de calcul bouleversent notre société. Comme on nous le repète sans cesse, à travers le classement de l’info, la personnalisation publicitaire, la recommandation de produits, le ciblage des comportements ou l’orientation des déplacements, les méga-calculateurs sont en train de s’immiscer, de plus en plus intimement, dans la vie des individus. Or, loin d’être de simples outils techniques, les algorithmes véhiculent un projet de gestion de la ‘Cité’.

C’est suite à une très intéressante interview de l’auteur, diffusée sur une radio bien analogique, que je me suis empressé d’aquérir chez mon libraire une version papier de ce court opus. Il m’a rappelé que ce qui est vrai pour la société dans son ensemble est vrai également pour le monde de la communication.

La question centrale du projet que nous nous devons construire pour le marché illustre que la technologie n’est qu’un moyen, et pas une finalité. Cette même question nous renvoie directement à l’auteur de la sanction ultime: le consomateur. Ce dernier s’exprime d’ailleurs de façon conséquente au travers de 27% des internautes belges qui utilisent un ‘ads blocker’. Aurions-nous oublié qu’avant d’être une profession de techniciens, nous sommes une profession de communicants? Ici, notre capacité à diffuser (plus, plus souvent, moins cher) doit être nuancée par le sens que nous voulons donner au travers de la pertinence des espaces, moments et fréquences de communication.

Un projet politique est vertueux s’il a pour but la gestion et le développement de la ‘Cité’, tout en respectant le bien-être des différentes parties. A nouveau, l’analogie est frappante, le modèle que nous devrons atteindre doit générer 4 gagnants: le consommateur (par la pertinence de nos propos publicitaires), l’annonceur (par l’impact et la rentabilité renforcée de ses actions), les médias (par la valeur financière réelle accordée à leurs espaces)… et les agences qui ont l’opportunité de démontrer leur valeur ajoutée. Conclusion: les solutions ne se trouveront pas en faisant l’économie de l’implication d’une ou plusieurs des parties.

(*) À quoi rêvent les algorithmes "Nos vies à l'heure des big data" par Dominique Cardon - Coédition Seuil, La République des idées