Agency pitch

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La compétition pour la sélection des agences de pub

Comment optimaliser le processus de sélection des agences créatives, pub et communication, lors d'une compétition organisée par un annonceur? Après des années de pratique, un ouvrage vient de sortir. Il entend faire la synthèse de cette matière et surtout proposer une série de pistes pour faire évoluer le processus bien connu du «pitch». Un ouvrage  "Adverteerder zkt. Reclamebureau", co-écrit par Martine Ballegeer et Chris Van Roey, dont l'ambition est de lutter contre des clichés encore bien vivants entre annonceurs et agences et de prolonger la durée de vie de leur collaboration.
«L'amour dure trois ans» a titré un jour Frédéric Beigbeder pour un roman qui fait aujourd'hui partie des classiques du genre. A regarder de près la relation entre l'annonceur et son agence créative, le divorce est consommé en moyenne après ce cap des trois années. «C'est un des constats qui nous a poussés à écrire cet ouvrage,» indique d'emblée Chris Van Roey, partner chez Pitch Point, mais aussi ceo de l’UBA et fondateur de The House of Brands.
«Pour bâtir des marques fortes, il faut plusieurs années de collaboration. On s'est donc penché sur cette question du cycle de vie aujourd'hui limité entre annonceurs et agences. Si une marque est amenée à organiser une compétition de recrutement, la première question est de savoir pourquoi. Histoire d'éviter ensuite de reproduire les mêmes erreurs.»
«Et puis, on a aussi constaté qu'il y avait très peu d'expertise en matière de compétitions d'agences,» enchaîne Martine Ballegeer, partner chez Pitch Point et active au sein de The House of Brands. «La plupart des études françaises sur le sujet montre que pour une grande majorité des pitchs, c'est mal organisé. On a donc voulu remettre le sujet sur la table et essayer de mettre des outils à disposition des annonceurs et des agences pour qu'ils se comprennent mieux.»

Briser les stéréotypes
Et de proposer donc un tableau reprenant les clichés les plus récurrents en la matière. «Ils sont en effet nombreux,» poursuit Chris Van Roey. «Ils ne connaissent pas notre business disent les annonceurs. Ce à quoi répondent les agences: ils n'y connaissent rien en communication. Ou bien les annonceurs disent: ils ne suivent pas notre briefing. Et les agences répondent: les briefings ne sont pas clairs et sont superficiels. Voilà deux exemples parmi d'autres. C'est en cassant ces stéréotypes que nous pourrons arriver à une relation meilleure entre ces deux mondes.»
Une relation à soigner donc, car pour Martine Ballegeer, «c'est clairement dans l'interaction entre l'annonceur et l'agence que les plus belles choses vont être réalisées. Et cette relation doit être construite dès le pitch de sélection. Je pense notamment à ce qu'a fait Telenet récemment en insistant sur cette collaboration réciproque. C'était un travail très intensif en plusieurs étapes mais l'annonceur au final a eu l'impression de choisir l'agence plutôt que la campagne. Le pitch créatif pensé comme un processus one shot n'est pas à conseiller si on veut justement aller au-delà de ces stéréotypes.»

L'«Above The Line» plutôt bien organisé
Pour Bruno Liesse, directeur de Deepblue, au sein d’ Aegis Media«il faut bien reconnaître qu'en la matière, le above est plutôt bien loti. Les compétitions sont assez bien structurées. On ne peut pas en dire autant pour le below et le digital où là, il est temps de mettre de l'ordre. Il y a en effet des cas qui ne sont pas acceptables. Notamment ceux qui mettent en compétition une dizaine d'agences et qui attendent à la fois un travail stratégique et créatif qui peut durer des semaines, ce qui demande aux agences un travail considérable. Sans oublier que, bien souvent, cette étape est biaisée du fait que l'agence va tout donner. L'annonceur de son côté va également faire un briefing bien structuré. Une fois que la relation sera établie, cela ne se passera plus comme ça au day to day.»
D'où l'importance en effet de faire un choix d'agence en âme et conscience et surtout de saisir d'emblée celle avec qui la relation dans le temps va pouvoir être optimale. «Il existe des alternatives au simple pitch créatif,» nous dit Martine Ballegeer. «Le chemistry meeting, ou bien le workshop par exemple. L'annonceur ne va pas attendre que l'agence revienne avec la solution mais va organiser un ou plusieurs workshops qui seront plus riches que le simple briefing à glisser dans une boite noire et dont on ne sait pas d'ailleurs où aura été trouvé la solution. Dans le cas de cette alternative, on détourne l'attention de la sélection proprement dite vers la relation de travail.»
«On détaille d'ailleurs dans notre livre quatre catégories de pitch,» poursuit Chris Van Roey. «De l'orientation générique au pitch stratégique en passant par le pitch créatif donc et celui qui nous semble le plus intéressant, celui qui va permettre d'évaluer si la chimie fonctionne, le chemistry meeting, ce qui va faire qu'on va pouvoir faire émerger l'équation gagnante du 1+1=3!»

L'importance du consultant
Autre tendance dans ce processus très spécifique de la sélection d'une agence, celle de recourir de moins en moins à des consultants extérieurs. «Deux pitchs sur quatre, voire deux sur trois, se font en effet sans faire appel à un consultant.» poursuit Bruno Liesse. «L'annonceur va le faire de manière intuitive. Sans prendre en compte bien souvent les changements récurrents dans le secteur des agences. Le turn over des cadres est assez important et donc l'annonceur dans ce cas se lance sans avoir une bonne expertise du marché». Et d'ajouter: «il est primordial de bien connaître les agences, leur fonctionnement en interne, la vision de leurs services, la personnalité de leurs cadres. C'est un travail important qui va permettre à l'annonceur par exemple de se pencher sur les briefings et les travaux des dernières années pour faire un choix pertinent».
Pour Hilde Jonckers, ancien managing partner chez ShortList et actuellement partner chez Ziff -Jones, «le consultant a en effet un rôle crucial mais sur le marché belge, je n'ai pas l'impression qu'il y a suffisamment d'indépendance en la matière. Il n'y pas à mon sens, sur notre marché, de consultance totalement indépendante. Et les acteurs sont trop peu nombreux. Ce qui n'est pas le cas pour d'autres capitales comme Londres ou Paris par exemple où il y a beaucoup plus d'acteurs qui se partagent ce marché de la consultance entre annonceurs et agences.» La double casquette des sélectionneurs est évidemment au cœur de la problématique belge! Quant aux moteurs automatiques de sélections d'agences? «C'est un peu le principe de l'annonce «cherche blonde avec des yeux bleus»! Je ne pense pas que ce soit la meilleure manière de procéder. Il est important de bien connaître les personnes en interne, tant chez les annonceurs que dans les agences.»

Le financier n'est pas le premier critère
Enfin, de l'avis des agences qui organisent ces compétitions, c'est d'abord la créativité qui séduit les annonceurs. «Ils veulent le juste prix avec le plus de transparence possible,» indique Bruno Liesse. «Le financier n'est en effet pas le premier critère de sélection. Il peut intervenir à la fin s'il faut départager deux candidats qui se valent sur les autres critères. Cette réalité est toute autre dans le service public, qui compare les offres comme on compare des meubles! C'est assez aberrant!»
«La difficulté pour les agences est de répondre à une exigence chez l'annonceur qui est souvent double: celle du directeur marketing d'un côté et celle du département d'achat de l'autre, attaché au prix et au rapport qualité/prix. Il est parfois difficile de trouver cette perle rare qui peut répondre à cette double exigence,» conclut Martine Ballegeer. «Et une fois que le marché est remporté, il faut savoir que c'est un point de départ et pas un aboutissement. L'essentiel sera de faire durer cette relation en cassant les habitudes». Chris Van Roey rappelle lui pour conclure «l'importance pour les agences de se positionner. Ce sont bien souvent les cordonniers les plus mal chaussés! Ce sont des spécialistes du positionnement et doivent commencer par définir leur ADN. Elles ne peuvent pas tout faire et doivent le courage de se positionner.»

Entre agences et annonceurs, l'amour dure 3 ans
Après des années de pratique dans la compétition et la sélection des agences, un ouvrage co-écrit par Martine Ballegeer et Chris Van Roey entend apporter une synthèse de l'expertise en la matière et donner quelques conseils pour casser les clichés entre annonceurs et agences et augmenter le cycle de vie entre ces deux acteurs. En moyenne, une relation dure trois années. Le premier point quand un annonceur organise un pitch est de savoir pourquoi elle est amenée à organiser ce processus. Le temps est venu ensuite d'offrir des alternatives au simple pitch créatif, qui pour les experts n'est pas le processus idéal pour entamer une relation entre un annonceur et une agence. De moins en moins de pitchs sont gérés par des consultants extérieurs, qui restent les interlocuteurs privilégiés pour mettre en relation l'annonceur et une agence. Il est important aussi pour les agences d'oser se positionner pour optimaliser cette rencontre avec l'annonceur et ses exigences.

·        2 pitchs sur 3 organisés sans consultant extérieur
·        Le critère financier n'est pas prédominant dans la compétition
·        3 ans: durée de vie moyenne entre annonceur et agence
·        Privilégier le «chemistry meeting» au simple «pitch créatif»