Au bal pas très masqué ohé ohé

Communication / News

Il aurait été difficile de mieux respecter les distanciations sociales lors de ce Your Turn entre Antoinette Ribas et Alex Vizorek. Un écran et 300 kilomètres qui les séparent de Bruxelles à Paris, aucun risque on vous dit !

Elle est Creative chez Ogilvy SocialLab, élue Next Creative Leader en 2020 et Board Member du Creative Belgium, Antoinette vend sa créativité au service des marques. Alex est comédien, humoriste et animateur belge. Créatif oui, mais c’est surtout son image qu’il vend auprès des marques. Ce qui les différencie vraiment ? Le politiquement correct. Entre rires, idées et publicité, ce mélange explosif nous a valu quelques maux de joues…

PUB : Pourriez-vous faire le métier de l’autre ?

Antoinette : Je suis très timide, j’ai des fous rires dès que je suis dans une situation stressante donc je ne pourrais pas. Par contre j’adore faire rire, c’est ma façon d’aborder la résilience.

Alex : Tu pourrais écrire des choses drôles ?

Antoinette : Oui je le fais parfois, pour des pubs. Un ami, Xavier Magnée, m’a dit un jour, on cherche tous les deux « l’évidence inattendue ». Et c’est vrai, j’ai besoin de trouver une évidence qui n’a pas encore été abordée si je veux révolutionner le domaine dans lequel on me demande de travailler, si je veux créer de la surprise et de l’intérêt. Mais toi aussi tu cherches à surprendre, nos métiers ne sont pas radicalement opposés.

Alex : Le rire c’est la surprise. Même le côté instinctif du corps au moment où tu ris, c’est parce que tu ne t’attends pas à ce qui va être dit. Sur la timidité tu as raison car la scène t’expose directement mais l’écriture et le travail des « punchlines », c’est la même chose. Si en quelques mots, tu parviens à expliquer une idée ou un concept, on a fait le même travail. La seule différence c’est qu’on n’a pas le même récepteur. J’émets pour un auditorat qui a envie de rire, toi tu as déjà un premier filtre qui est le commanditaire. Si celui-ci n’aime pas, ça n’atteindra jamais la cible visée.

Antoinette : Et puis le public ne m’attend pas, il me fuit. C’est le pied dans la porte [rires]. Les gens viennent te voir car ils sont curieux. Quand j’ai commencé, il y a 20 ans, les gens s’envoyaient encore des pubs par mails, il y avait la nuit des publivores, etc. Aujourd’hui, les médias ont foutu un peu notre boulot en l’air. Sur les réseaux sociaux, les gens sont « sur-targettés », ils n’en peuvent plus de la pub. Mais moi, ce n’est pas ça que je fais.

Alex : Lagardère a fait un texte justement en disant que la pub ne sert à rien. Mais si tu lis le texte de bas en haut, le sens change complètement. C’est extrêmement bien foutu et les gens l’ont partagé. J’en parlais il y a peu avec un directeur d’antenne radio. On se disait que le problème entre les radios privées et publiques, c’est le nombre de publicités, il fut un temps où quand on regardait la TV, on restait sur les pubs.

Antoinette : Ah mais moi je courais quand j’étais petite ! J’avais des troubles de l’attention donc une histoire très courte ça me parlait ! Il y avait beaucoup de pubs chantées, qui racontaient des histoires, ça parlait aux enfants. Mais je ne regarde plus la TV depuis 20 ans, c’est une agression totale de voir la pub comme ça, je ne peux pas le supporter. Je mets tellement un point d’honneur à faire des trucs chouettes et de qualité que quand je vois la fainéantise des créatifs, le manque d’audace de clients, les bonnes idées tuées, c’est comme si tu allais à un très mauvais festival de rire où tu sens le malaise des gens.

Alex : C’est qu’elle doit fonctionner cette fameuse pub : « ma lessive est meilleure que la tienne »… sinon les gens ne le feraient plus, non ?

Antoinette : Un message répété avec un grand logo, ça entre dans la tête des gens inconsciemment ou non. Et je me battrai toujours bec et ongles contre ça. Je chercherai toujours à faire soit de belles choses, soit des choses intelligentes, soit drôles ce qui est très difficile quand tu dois rester dans le politiquement correct. À la fin, tu arrives à quelque chose qui va mettre tout le monde d’accord mais qui ne va plaire à personne. C’est compliqué car les gens sont très réfractaires. Ton public n’a peut-être pas toujours été facile à convaincre, mais à un moment donné, les gens viennent te voir.

Alex :  Moi je ne suis pas opposé à la pub. Quand tu regardes un peu en arrière, Pierre Desproges a fait des pubs qui étaient vachement bien. Mais c’était une époque où les marques te filaient carte blanche. Donc elles payaient un humoriste pour les représenter. Je trouverais ça marrant en vrai, tant que ce n’est pas de l’armement, des produits chimiques, etc, bien sûr.

Antoinette : On a un autre problème dans la création, c’est que toutes les marques veulent s’imposer, avoir une démarche sociétale, créer une activation. Par exemple, au lieu de dire « le nouveau catalogue IKEA est là » dans une pub classique, on a fait une action en proposant aux gens de recycler leur ancien catalogue. C’est plus la même pub qu’avant, mais l’objectif reste le même : faire parler de la marque.

Alex : Il est vrai que l’acte final « il est important qu’on parle de la marque qui me paie » c’est compliqué pour nous. Quand je fais mes chroniques avec le logo de France Inter derrière, c’est de la pub pour eux. C’est un win-win parfait car moi je peux dire ce que je veux. Si je fais ce métier c’est pour que les gens viennent me voir en spectacle. Donc si on va au bout des choses, c’est pour que les gens achètent des places. J’ai fait marketing à Solvay, donc je vois tout à fait le milieu. J’ai travaillé avec Thierry Ardisson et Frédéric Beigbeder, la pub regorge d’artistes. En soit, ce n’est pas non plus l’ennemi absolu.

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