« Fini de rire »

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Dire que la vidéo en ligne est intéressante pour le marché publicitaire est un euphémisme ! Après une croissance exponentielle, de nombreuses questions restent sans réponse. Et beaucoup de travail reste manuel, ce qui est en pleine contradiction avec la digitalisation ambiante.
videos online
L’absence d’une norme pour les publicités et les vidéos en ligne ne facilite pas la vie des agences média. « C’est vraiment du bricolage, » dit Sophie Vancoppenolle, head of online video / RTV convergence chez Space. C’est déjà le cas en amont : les sites nationaux se retrouvent souvent dans les mesures CIM, mais pas les sites internationaux tels que YouTube. AdWords et comScore doivent remplir des lacunes. Du côté de l’offre, il y a de grandes différences : 15”, 30”, des vidéos avec des publicités non ‘skippable’… Sans parler des vidéos long format. « Tout le monde tient compte de paramètres différents, chaque choix exclut un résultat précis, » poursuit-elle. « Difficile pour l’annonceur qui ne sait plus sur quoi se baser, ni ce qu’il vend : des clics ? Des vues ? De la durée ? »
Qualité standardisée
L’étape suivante est celle de l’achat. Or, le programmatic buying semble entraîner davantage de travail manuel. Les agences média achètent une partie par bons de commande, une partie par programmatic buying auprès d’une seule et même régie. Dans ce dernier cas, elles concluent un accord avec les régies, car on peut lancer des publicités de façon ciblée, avec des mots clés ou un contexte. En outre, il y a AdWords pour YouTube, etc. Résultat : un joli chaos. Cela ne touche pas directement l’annonceur, qui peut tout de même avoir un problème avec les résultats d’une action. La formule utilisée par son agence est-elle la bonne ? Les agences média font désormais appel à leurs propres formules pour atteindre le reach prévu, et les formules d’une agence ne sont pas forcément les mêmes que d’autres. La solution ? « Développer des normes, » répond Sophie Vancoppenolle. « Il faut s’y mettre de toute urgence ! Les chiffres du CIM pourraient bénéficier d’une meilleure précision : quel est le nombre de vidéos ? En fait, on devrait aussi retrouver les données des annonceurs étrangers dans les résultats du CIM. Et que faire des clics sur YouTube, des bannières…? Un clic compte parfois deux vues. Nous voulons proposer une qualité standardisée. »
L’irritation est manifeste
Il y a un an, Medialaan a mis sur www.vtm.be des épisodes entiers à disposition gratuitement. Le groupe média a maintenant 600.000 utilisateurs inscrits. « Nous sommes petits en ligne, mais dans le domaine des vidéos en ligne, nous prenons chaque jour un peu plus d’importance, » constate Ben Jansen, directeur commercial de Medialaan. « La digitalisation est une bénédiction pour la télévision, on la regarde plus que jamais. » Et ce phénomène ne fera que s’intensifier lorsque le wifi sera disponible de façon universelle, notamment dans les villes et les moyens de transports. « Un regard critique et commercial nous apprend qu’il n’y a que peu, voire pas, de structure dans le contenu en ligne. Il n’y a pas non plus de norme, pas de vision de la qualité, » poursuit Ben Jansen. « L’irritation des utilisateurs par rapport à la publicité en ligne est palpable. C’est un signe qu’il est temps d’être sérieux. »
Depuis que Medialaan a intégré la régie en ligne et l’a limitée à ces tâches principales, l’équipe de Ben Jansen a appris que la vidéo en ligne ne cannibalisait pas la TV, au contraire. Pendant cette période, on a redécouvert à quel point la télévision est qualitative dans la relation entre contenu et publicité, à plus forte raison par rapport au online. Medialaan prend maintenant l’initiative de travailler avec des normes claires et de qualité, espérant créer, avec l’UMA, l’UBA et d’autres entreprises médiatiques, un cadre pour la vidéo en ligne. Medialaan a récemment proposé sa politique aux agences média et aux annonceurs. Pour commencer, elle va déployer, en janvier 2016, une solution contre les adblockers. De plus, les vidéos (contenu et publicité) s’arrêtent déjà lorsque vous ouvrez un autre signet ou lorsque vous descendez sur la page. Il n’y a pas de publicité pour les clips vidéo de moins d’une minute. Le shortform (61” à 8’) n’a jamais plus qu’un spot de maximum 15”. Pour le longform, il y a un maximum de six minutes de spot par heure (la télévision a légalement droit au double), on propose d’autres publicités par DAI et c’est une exclusivité sectorielle. En outre, la publicité n’est comptabilisée qu’à partir du moment où elle a été visionnée à 50%. « Nous avons de meilleurs résultats, mais ce n’est que le début, et c’est par ailleurs en accord avec les normes en vigueur pour la télévision, » précise Ben Jansen, qui ajoute que Medialaan travaille avec du secured content : lors d’un bulletin d’actualité, le journaliste indique les moments où il ne peut pas y avoir de publicité – pas de publicité pour une bière synonyme de fête avant un reportage sur des attentats, par exemple – et il y a un deuxième filtre manuel du service commercial. Cela repose sur trois critères : ad verification (quand une vue est-elle une vue, quand la publicité peut-elle être considérée comme visionnée et comptabilisée), brand safety (un environnement sûr) et ad acceptance (qui est particulièrement élevée auprès des utilisateurs enregistrés de Medialaan). « Nous travaillons dans le respect du public et des annonceurs, » conclut Ben Jansen.
Suffit-il de mesurer ?
Tout cela est très bien, mais les annonceurs savent-ils ce qu’ils ont acheté ? Ben Jansen donne la parole à Wilfried Celis, sales director : « Nous sommes favorables au CIM, où personne ne décide de la méthodologie unilatéralement, comme c’est le cas dans d’autres pays, » dit-il. « Mais il y a du pain sur la planche. Nous travaillons avec toutes les chaînes sur un projet qui devrait nous mener à une video-currency, indépendamment de la plateforme. Nielsen essaie de faire cela aux Etats-Unis avec son online campaign rating (OCR). Nous allons avoir besoin d’une feuille de route. Si en 2016, le CIM dispose des résultats Gemius pour la vidéo en ligne pendant le premier trimestre, l’étape suivante sera de mesurer le online video-advertising et ensuite de fusionner avec le premier écran. »
Et comme tous les chemins mènent à Rome, cette discussion passera inévitablement par Google (et YouTube). Attendra-t-on Godot ou le géant américain se penchera-t-il lui aussi sur les normes et l’harmonisation des mesures ? Affaire à suivre, et très certainement dans un prochain numéro.