Gand et ses success stories: La créativité est récompensée

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Le Financial Times a dit de Gand qu'elle était une little wonder, Lonely Planet en a parlé comme du secret le mieux gardé d'Europe, et le scientifique britannique Charles Landry assure qu'elle est parmi les villes les plus créatives du monde. Trois acteurs nous parlent de leur relation avec Gand et leur vision du secteur.

« C'est une bonne chose que nous n’ayons jamais déménagé à Bruxelles, » lancent-ils chez The Fat Lady. Cette agence de pub « content » se situe entre la gare Dampoort de Gand et les anciens quais (Dokken). Pendant tout un temps, Gand était la petite ratée du monde de la pub, rapportent les managing partners Koen Denolf et Frank Geerts: « Celui qui n’avait pas siège à Bruxelles ou Anvers, ne comptait pas. Les temps ont changé ! » The Fat Lady a une approche plutôt impertinente, très proche de la philosophie de la ville. « La ville de Gand est d’ailleurs un de nos clients. Le type de communication très libre que nous avons déjà pu réaliser pour la ville serait inacceptable dans beaucoup d’autres villes. Gand aime bien le challenge. »

Michel Devos de Vandekerckhove&Devos est on ne peut plus d’accord. Jusqu’en 1998, cette agence de pub était située dans le cœur historique de Gand, rejoignant Melle par après. « Contrairement à nos collègues dans les grandes villes, nous ne connaissons pas le phénomène de 'job hopping' ici, » raconte-t-il. « Notre agence peut compter sur une équipe de collaborateurs fidèles, ce qui est un avantage pour la stabilité des produits et des relations avec nos clients. » Il faut savoir que le produit le plus important chez Vandekerckhove&Devos n’est pas la pub, mais bien la création et la stratégie. « Et pour cela, l'idéal est de se trouver à Gand ou dans ses environs, » affirme Michel Devos. « A Gand, on trouve un bon mix entre l’esprit sain de l’entrepreneur flamand et les structures d’une grande ville comme Bruxelles. Gand doit en grande partie sa réputation aux initiatives privées. Mais la ville aussi encourage la créativité. Ici, il est possible de venir avec les idées les plus folles. Nous aussi nous avons eu, avec notre réputation de 'rebelles' dans le monde de la pub, la chance de grandir avec notre passion, notre énergie et nos connaissances pour devenir une agence multidisciplinaire. Un peu moins que la moitié de notre temps est consacré à la pub ; le reste, nous l'occupons avec de la réalisation d’images, du développement de produits, du packaging, du graphisme, de la création de magazines ou de brochures, et même avec du développement de solutions complètes en comm'. »

Histoires pertinentes

L’agence The Fat Lady est issue de la fusion du spécialiste du content marketing Het Salon et de l’agence de pub Markee. « Nos expertises s’entremêlaient de plus en plus, une tendance générale dans notre secteur, » témoigne Koen Denolf. « Il était temps pour nous de regrouper nos deux disciplines et de la fondre en une seule. » L’équipe entière croit en la publicité à contenu, le content advertising: la publicité avec une histoire pertinente. « Nous ne pratiquons plus la communication top-down. Nous voulons que notre communication parte du besoin du consommateur et non de celui de l’annonceur. C'est répondre aux questions : à quoi s’intéresse le groupe-cible ? Quel est le problème ? Quelle solution est offerte par la marque ou l'entreprise? »

azLe Wasbar est un bon exemple d’une stratégie de marketing de « content » bien pensée. Cette success story est née à Gand. Le concept – un endroit branché où l'on peut boire, manger, rencontrer d’autres personnes, lire son journal ou surfer sur internet alors que notre lessive tourne dans l'une des machines mises à disposition – est conçu par les marketeers Dries Henau et Yuri Vandenbogaerde. Dès le début, le duo a directement fait appel à un bureau de relations publiques. « Avec notre passé en marketing et communication, nous étions conscients que l’histoire derrière la marque est aussi importante que la marque elle-même, » raconte Dries Henau. « L’histoire sympa n’était dans notre cas pas difficile à trouver puisque le Wasbar est né à partir d'un problème personnel : notre habitation était en effet trop petite pour y placer une machine à laver. Après ça, nous avons voulu changer une simple visite à la laverie en une expérience fun. Nous étions convaincus qu’une pareille initiative marcherait à Gand car le Gantois est très large d’esprit. En plus, la ville voyait l’économie du partage et la mentalité du « upcycling » émerger. » Leur groupe-cible? « Pas les étudiants parce qu'ils donnent leur lessive à maman. Plutôt les jeunes qui sortent de l’université, restent habiter à Gand et ne peuvent se permettre qu’un petit appart' où il n’y a pas de place pour une machine. Les gens qui ont une machine à laver viennent aussi au Wasbar, mais pour gagner du temps. »

Le revers de la médaille

Nos interlocuteurs ont une relation amour-haine avec Gand. Michel Devos: « A l'époque où notre agence se trouvait encore au cœur de la ville, nous faisions face à deux grands problèmes: un manque d’espace et une mobilité difficile. Gand est une ville fantastique, mais en fin de compte nous avons préféré nous installer en banlieue. La seule chose qui nous manque vraiment, ce sont les bons restaurants. »

The Fat Lady est ravie des plans qui se profilent pour le quartier de la Dampoort et se réjouit de la venue d’entreprises créatives. Mais, dit Koen Denolf, Gand ne profite pas assez de cette invasion créative de la ville: « Les deux dernières années, un grand nombre de petites agences ont aidé à faire apparaître Gand sur la carte. Là où d’autres villes auraient immédiatement mis la main sur cette scène créative pour la promouvoir à l'image d'une Silicon Valley créative, Gand ne tire pas avantage de cette opportunité. Nous espérons voir un changement. » Le Wasbar a également connu le revers de la médaille gantoise. « Le Wasbar a eu, dès le début, un caractère international car nous ne voulions pas être limités à une ville. » Le duo a laissé la création entre les mains d’un bureau de design, mais Gand et Wasbar étaient vite liés de façon indissociable. « Les filiales d’Anvers et Courtrai étaient d’abord qualifiées de pâles copies de l’original gantois. Et à Gand, il y avait souvent la notion qu’il s’agissait d’un endroit branché, destiné aux hipsters et pas à Monsieur-Tout-le-Monde. Ce qui n’était pas du tout l'objectif ! Heureusement, cette notion a vite disparue. Et les trois lieux sont tous aussi rentables l’un que l’autre. »

ze365 jours de communication

Vandekerckhove&Devos et The Fat Lady ne pensent plus en termes de campagnes. Ils se concentrent davantage sur les plateformes de communication online, celles de contenu dans les médias « paid, owned et earned », et sur le long terme. “Tous les annonceurs ne sont pas ouverts à cette stratégie, mais de plus en plus d’entreprises commencent à croire en l’effet de cette approche, » avoue Koen Denolf. « La marque reste 365 jours sur les lèvres et l’effet se fait voir immédiatement. »

 

Le Wasbar doit également aller à la recherche de nouveaux moyens pour continuer à attirer l’attention des médias. « Il faut être innovant et le rester, en ajoutant de nouveaux éléments au concept de base. D'ailleurs, le Wasbar offre non seulement à boire, à manger, à laver et à surfer, mais on peut également y réserver une salle de réunion, assister à un concert ou organiser des soirées privées. Nous sortons des livres et avons lancé un blog de voyage. Ces sont à chaque fois de nouvelles façons de faire parler du Wasbar. » Un autre outil bien utile: le sponsoring. Le Wasbar est un showroom ‘live’ pour Electrolux et Ecover. Et les médias sociaux représentent une source alternative à la publicité. Si surfer est gratuit, les clients doivent quand même d'abord se connecter… ce qui indique automatiquement qu'ils se trouvent au Wasbar sur leurs réseaux.

 

De Gand à Paris, et plus loin

 

The Fat Lady n'a commencé ses activités qu'il y a six mois, mais se fait remarquer aussi bien sur le plan national qu’international. « En ce moment, nous travaillons sur un pitch important pour une société néerlandaise qui nous a choisi pour notre méthodologie, » explique Koen Denolf. La société fut nominée pour un Cuckoo Award (BDMA) pour leur événement de lancement durant lequel une chanteuse d’opéra chantait les tweets avec hashtag #Thefatlady – la remise de prix a eu lieu le 21 mai dernier.

De son côté, Vandekerckhove&Devos a refusé des offres de rachat.. « Laissez-nous continuer gentiment de la façon dont nous travaillons aujourd’hui. Notre portefeuille est solide, varié et bien équilibré, et nous sommes contents de notre position actuelle sur le marché. » Mais Michel Devos lance quand-même un appel à toutes les sociétés : pensez davantage à l'avenir quand il s’agit de communication. « Les annonceurs prennent encore trop de décisions sur base du passé, là où nous devrions être poussés par le marché et la société du futur. »

 

Et le Wasbar? Deux ans après son lancement, ses propriétaires ne parviennent pas à répondre suffisamment vite au grand nombre de demandes de franchises. Certainement que les articles parus dans le New York Times, Marie-Claire Brésil, Condé Nast Traveler et récemment Lonely Planet Gand ont aidé. « Nous avons déjà des demandes de Lokeren, Alost et Saint Nicholas, et l'international se manifeste de Milan à Sao Paolo ou Amsterdam. De l'autre côté de la frontière, une première succursale s’ouvrira probablement à Paris début 2016. » Le Wasbar a été nominé pour le prix 'Dé Gentse Ervaren Ondernemer'. Au moment où vous lisez ces lignes, vous saurez si le Wasbar a remporté le prix : la proclamation a eu lieu le 28 mai dernier.

Tine Hemeryck

Daniël Termont: « Une métropole en format de poche »

Daniël Termont, bourgmestre de Gand, n'est pas peu fier des compliments que sa ville reçoit. « Nous recherchons continuellement des moyens pour améliorer l’image de la ville , sans pour autant s'inventer un profil. Gand est la ville qu’elle promet d’être.”

Récemment Daniël Termont (SP.A) fut élu le deuxième meilleur bourgmestre au monde, mais on ne peut certainement pas l’accuser de folie de grandeurs. Cet homme répond personnellement à tous ses emails et tweets. Nous le rencontrons au retour de sa balade quotidienne à travers la ville. « C’est dans la rue, qu’on est le plus bourgmestre. »

Bourgmestre de la collaboration

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Daniel Termont ne mâche pas ses mots: l’image positive dont bénéficie Gand est due à de nombreuses personnes. « De plus en plus de Gantois font de plus en plus d’activités ensemble. C’est formidable ! La ville de Gand communique via un tas de médias différents : nous possédons notre propre magazine et site, nous produisons StadsTV et utilisons les médias sociaux comme Facebook et Twitter. Nous allons aussi chez les gens, dans leurs quartiers. Nous avons l’université et les hautes écoles qui forment nos étudiants à devenir des créatifs talentueux, et la ville stimule les success stories, petites ou grandes. Le fond de marketing de la ville contribue au rayonnement positif de notre ville entre autres par le biais de festivals, de grands congrès internationaux et de films qui sont tournés à Gand. »

Gand est la première ville en Flandres qui a créé une plateforme pour le crowdfunding en faveur des projets créatifs locaux, https://crowdfunding.gent/. « Nous offrons la plateforme, » détaille Daniel Termont, « mais ce sont les habitants qui viennent avec leurs propositions. » Puis il y a encore Ghentlivinglab.be, un forum pour les Gantois, développeurs et experts avec des idées, des opinions, l’envie de tester des innovations et d’aider à les développer : des apps pour personnes à mobilité réduite, aux façades qui deviennent des oasis comestibles, rien n’est trop fou à Gand.

Très direct

« La ville est exactement ce qu’elle promet d’être et c’est cet élément qui forme l’idée de base du city marketing, » pense le bourgmestre. « Gand est plein de vitalité, Gand est sociable, créatif et large d’esprit. Pourquoi y ajouter des éléments que nous ne pourrions pas réaliser? What you see is what you get, les gens aiment ce sentiment de sobriété. Un autre avantage de Gand est le fait que la ville n’a pas de profil bien spécifique. Qui dit Anvers pense diamants ou ville portuaire, qui dit Louvain pense ville d’étudiants. Gand, par contre, possède tous ces éléments: ville de culture et connaissances, mais aussi ville portuaire, ville d’étudiants, ville de musique, ville shopping et ville de fleurs. Charles Landry, une autorité en ce qui concerne l’imagination dans le changement à l’intérieur des villes, décrit Gand comme une 'pocket-sized metropolis'. Une ville à allure mondiale, en format de poche! C’est super, non? »

Nota bene : la politique à suivre

Daniel Termont vit son quatrième et dernier mandat dans le collège échevinal, ainsi que son deuxième mandat de bourgmestre. Voit-il encore des défis à relever ? « La popularité a son revers. Regardez les chiffres de la pauvreté et problèmes de logement à loyers trop élevés. Mais nous y travaillons fort. Nous pensons à de nouvelles consignes en ce qui concerne la communication, l’accueil, la participation au pouvoir et le city marketing, pour évaluer les initiatives et canaux existants, les rajeunir et y ajouter de nouveaux éléments. Nous voulons devenir la ville la plus accueillante pour les jeunes en Flandre, et réduire notre émission de carbone à zéro d’ici 2050.