La durabilité, à mi-chemin entre l'être humain et le sens

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Bigtrees et Choco accordent tous deux beaucoup d'importance à la durabilité, mais adoptent une approche différente. Wannes Van Giel, dirigeant de Bigtrees à Gand, est parti de son passé au sein du mouvement écologiste, et Krist Pauwels, fondateur de Choco, de l'idée que la qualité des relations constitue la base de la durabilité.  - Evy Van Ruyskensvelde, Photos Luc Hilderson

Nous nous retrouvons chez IAMCESAR, ou Cesar en abrégé, un café et restaurant « vegan based » qui propose également des meubles, des objets de décoration et des conseils en matière d'aménagement intérieur. Le cadre idéal pour un agréable entretien avec Wannes Van Giel (Bigtrees) et Krist Pauwels (Choco). Pas tout à fait étrangers l'un à l'autre, ils ne se connaissent toutefois pas très bien.

Krist Pauwels : « Nous ne nous rencontrons pas souvent dans l'univers de la publicité, mais nous nous sommes déjà vus une fois. Au moment où votre projet en était à ses balbutiements, non ? »

« Il y a un énorme fossé entre l'intention et le comportement. » – Wannes Van Giel

Wannes Van Giel : « Oui et non. Je suis venu chez vous une fois à un moment où Bigtrees se trouvait à la croisée des chemins. Pour moi, Choco a toujours été l'agence qui ne faisait pas comme les agences de publicité classiques, mais qui part de l'idée que tout doit avoir de la valeur. Et cette conversation m'a effectivement bien aidé sur mon cheminement. »

Krist Pauwels : « Chez Choco, nous essayons, dans tout ce que nous faisons, d'aspirer à des relations d'une qualité fondamentalement bonne. La relation entre les gens, voilà la réelle valeur de ce qui se passe dans le monde, contrairement à l'argent, qui est un moyen d'échange. Et la communication vise à maximaliser ces valeurs. »

Wannes Van Giel : « C’est la raison pour laquelle nous sommes deux agences différentes. Chez moi, la motivation puise son origine dans mon passé au sein du mouvement écologiste. Un autre motif qui m’a poussé à entrer dans le monde de la publicité était que je voyais en son message une finalité : éveiller la conscience des gens. Les campagnes de sensibilisation ne fonctionnent pas. Je crois bien plus en des mécanismes efficaces liés à l'économie et au comportement. Les gens n'achètent pas Tony’s Chocolonely seulement pour son récit, mais plutôt parce qu'il s'agit du meilleur chocolat qui existe. Souvent, il y a un énorme fossé entre l'intention et le comportement, et nous essayons de combler ce fossé afin que les gens puissent faire des choix réellement durables. »

Krist Pauwels : « Je trouve que c'est une bonne raison. Les gens ne s'attendent pas à un récit unique, mais à un package complet. Ce défi est très intéressant pour l'ensemble du mouvement écologiste. S'il réussit à montrer que l'écologie peut également avoir un aspect social ou qu'elle soulage le portefeuille des gens, l'attention de la communauté sera plus grande. Si, par ailleurs, les grands acteurs économiques se rangent derrière des innovations écologiques, nous pourrons, je pense, parler d'un début de changement à l'échelle mondiale. »

Krist Pauwels (Choco) : « Je pense que nous partons de deux orientations différentes, mais que nos chemins se croisent. »

Wannes Van Giel : « Effectivement, et d'autant plus si les échanges commerciaux s'effectuent au sein d'un cadre clair déterminé par la communauté. La directive européenne Ecodesign, par exemple, établit une nouvelle mesure qui limite la puissance en watts des aspirateurs, car au-delà de 900 watts, l'appareil génère de la chaleur, sans pour autant aspirer plus fort. Cette mesure permet à elle seule d'éviter 11 millions de tonnes d'émissions, soit près d'un tiers de ce que la Belgique doit atteindre dans le cadre de l'accord sur le climat. »

« Les relations entre les gens, voilà la vraie valeur. » – Krist Pauwels

Krist Pauwels : « Je dois vraiment me retenir de dire : “Nous allons montrer comment faire.” Non pas que nous intimions constamment les marques de mener des campagnes durables axées sur les relations. Mais je pense réellement que ce sont ces types d'organisations que nous attirons. De la sorte, nous ne faisons d'ailleurs pas la différence entre les clients commerciaux et non commerciaux. Nous devons faire un pas en avant tous ensemble. »

Wannes Van Giel : « Pour le coup, je suis d'accord. Aujourd'hui, nous travaillons beaucoup sur des projets du secteur public, mais notre philosophie pour les clients commerciaux est la même, à savoir que les choix durables sont toujours les plus avantageux. Et parfois, il faut se creuser la tête : bien entendu, une campagne pour une location de vélo est plus facile que pour une assurance automobile, mais au bout du compte, la vision selon laquelle les choix durables ont toujours une valeur plus élevée fonctionne à chaque fois. »

Krist Pauwels : « Je pense que nous partons de deux orientations différentes, mais que nos chemins se croisent. »

Transparent sans idéaliser

Wannes Van Giel : « Les marques n'ont d'ailleurs pas tellement à apprendre des agences, mais plutôt des autres marques. Les marques telles que Patagonia, que j'admire vraiment beaucoup. Ou Puma, qui est très transparent au sujet de ses ambitions sur la durabilité, et l'exprime de façon très sincère, sans idéaliser. »

Krist Pauwels : « Ou encore Wouter Torfs et son équipe. Ils sont très doux dans leur façon de diriger, leurs propres collaborateurs sont très importants, et ils sont également en avance dans leur relation avec le client et le reste du monde. Ce que font Frans et Jef Colruyt à plus grande échelle est aussi franchement malin et innovant. »

Wannes Van Giel (Bigtrees) : « Les marques n'ont pas tellement à apprendre des agences, mais plutôt des autres marques. »

Wannes Van Giel : « Vous savez, en tant que publicitaire, nous croyons souvent que nous sommes hyper créatifs et que nous pouvons trouver une solution à tout, mais les jeunes entrepreneurs d'aujourd'hui, ceux sont eux qui sont créatifs ! J'en veux pour preuve Too Good To Go, une initiative contre le gaspillage de nourriture, ou Redopapers, deux femmes qui fabriquent de magnifiques calendriers et agendas à l'aide de résidus d'imprimerie, ce qui me fait d'ailleurs penser à une superbe campagne que vous avez menée pour les magasins de seconde main. Sans oublier w.r.yuma à Anvers, une personne qui imprime des lunettes de soleil sur mesure à l'aide de plastique recyclé. Il veut dans un premier temps fabriquer les plus belles lunettes possible, puis voir s'il peut en faire une entreprise. Cela force le respect. »

Krist Pauwels : « On le sent également dans la vie en communauté : il en découle une sorte d'économie gagnant-gagnant. Vous y gagnez, le client y gagne, et tout le monde y gagne. À l'avenir, les marques n'auront plus d'autre choix que de se concentrer sur le sens. Sauront-elles apprendre cela ? Cette tendance est déjà en train d'apparaître, mais d'après moi, elle continuera à s'approfondir dès l'an prochain. »

Krist Pauwels (Choco) : « Chez Choco, nous essayons, dans tout ce que nous faisons, d'aspirer à des relations d'une qualité fondamentalement bonne. »

Wannes Van Giel : « Je passerais bien prendre un café ! »

Krist Pauwels : « Vous êtes toujours le bienvenu ! Avec grand plaisir. »