Le content marketing : plus que du buzz?

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Le content marketing promet de faire tout ce que les messages publicitaires courts traditionnels ne peuvent pas faire : crédibilité, authenticité, profondeur… Les agences spécialisées fleurissent, tandis que les agences publicitaires classiques leur emboîtent le pas. Mais combien de temps cette mode va-t-elle durer? À moins que ça ne soit pas une mode?

head office

« Le content marketing est mort. » Étrange déclaration que celle de Gilles Van Lembergen, dirigeant de Head Office, sQills et KungFu, trois agences de content marketing qui font partie de Sanoma Media Belgium, éditeur d’entre autres, Flair, Feeling et Libelle. Prêche-t-il contre sa propre église ? Que du contraire. « Le content marketing tel que nous l’avons connu il y a deux ou trois ans a fait son temps. C’est ce que je veux dire par là. » Selon lui, le contenu est important, mais pas suffisant. Il ne doit pas seulement être informatif, il doit aussi rapporter. Le magasine classique pour les clients avec de beaux articles ne compte plus. Les marques veulent de plus en plus que le content marketing livre des résultats concrets et qu’il pousse le consommateur à l’achat. « En tant qu’agence, il faut pouvoir montrer ces résultats, » dit Gilles Van Lembergen. « La mesurabilité du content marketing est cruciale. » Anne Thys, managing director de Headline Publishing, va plus loin encore : selon elle, la publicité classique a perdu une partie importante de son impact. « Le consommateur attend des informations objectives et exactes sur les produits et les services qui lui sont proposés, pas des slogans. Il ne se laisse plus mener par le bout du nez. Voilà qui explique le succès du content marketing. » Mais qu’est-ce qu’un bon contenu ? Nous avons posé la question à Gilles Van Lembergen, Anne Thys, mais aussi à Hans Faelens (management et marketing chez Jansen & Janssen).

Gilles Van Lembergen

Gilles Van Lembergen : « La vidéo joue un rôle de plus en plus grand. »

Hans Faelens : « Qu’est-ce qu’un bon contenu ? Tout dépend de l’objectif. Le contenu doit-il contribuer à faire connaître une marque ? Créer un lien avec le consommateur ? Pousser le consommateur à l’achat ? Un bon contenu parle aux destinataires par sa pertinence, mais ce qui sera pertinent dans la phase d’awareness n’est pas la même chose que dans la phase de conversion. »
Gilles Van Lembergen : « Un bon contenu ne s’articule pas autour de la marque, mais autour du consommateur. Il doit l’interpeller et présenter une excellente valeur ajoutée, sinon il va se noyer dans une marée de messages. »
Anne Thys : « C’est un branded content, avec une intention commerciale, mais qui diffère tout de même fondamentalement du message publicitaire classique. La publicité part du principe qu’on a quelque chose à vendre. Le content marketing part du principe qu’on veut informer les lecteurs et les visiteurs. Ce n’est pas un hasard si de nombreuses agences de content marketing trouvent leurs origines dans le monde de l’édition ou du journalisme. Nous devons trouver un équilibre entre l’ADN d’une marque et le ‘what’s in it for me’ du lecteur. »

Ni publicité, ni journalisme

Qui produit le meilleur contenu, les publicitaires, les journalistes, ou les allrounders ?

Hans Faelens : « Le contenu, ce n’est ni de la publicité, ni du journalisme. Les journalistes ont une tradition de quatrième pouvoir, c’est une origine controversée. Les boîtes de contenu essaient de créer un lien avec le lecteur. Ils ont une approche complètement différente et poursuivent d’autres objectifs. Lorsque nous travaillons avec des gens qui viennent du journalisme, nous devons les changer et leur apprendre une autre façon de penser. Nous ne faisons pas de propagande, nous essayons de mettre en lumière les points forts d’un produit ou d’un service. »

Gilles Van Lembergen : « La vidéo joue un rôle de plus en plus grand dans le content marketing. C’est pour cela que nous cherchons de bons story editors, des gens qui savent donner un son et une image à une histoire. Un dessin vaut mieux qu’un texte pour attirer l’attention du consommateur. Mais l’analyse de données prend elle aussi de plus en plus d’importance dans la production et l’évaluation de contenus. Nous avons besoin de personnes qui mesurent quel contenu fonctionne sur quel canal. »

Est-ce difficile de convaincre les clients de l’utilité du content marketing ?

Anne Thys : « Le fait que le content marketing soit très en vogue nous aide à convaincre les clients, mais cela reste difficile de leur faire comprendre qu’ils ne doivent pas pousser leur produit pour attirer l’attention du consommateur. »
Gilles Van Lembergen : « Les clients sont de bonne volonté, mais ils réagissent lentement. Les structures internes des grandes entreprises ne sont pas faites pour piloter du content marketing. On y trouve des gens qui sont responsables de la publicité, d’autres qui sont responsables du marketing, d’autres du site internet et qui gèrent tout ce qui est en ligne. On dirait parfois qu’il y a un véritable mur de Berlin entre les départements, alors qu’il est justement indispensable de travailler ensemble pour que le content marketing fonctionne. Le content marketing est, par définition, multicanal. »

Du print au multicanal

audi

Pour quelles plateformes créez-vous du contenu ?

Gilles Van Lembergen : « Nous utilisons tous les canaux existants. Et nous guettons l’apparition de tout nouveau canal. Le mobile a gagné énormément de terrain ces 18 derniers mois. Il faudra seulement voir à quel point les consommateurs accepteront qu’on les suive sur leur smartphone pendant qu’ils se baladent dans un supermarché. Grâce à la technologie moderne, nous pouvons proposer au client du contenu hautement personnalisé, mais la question est de savoir s’il sera d’accord de lâcher un peu de lest sur sa vie privée en échange de réductions et autres avantages lors d’un achat. »
Hans Faelens : « Pour être franc, je dirais que le passage des canaux imprimés vers les canaux numériques se passe moins vite que ce que je pensais. Aujourd’hui, notre travail est 70 pour cent en print, et 30 pour cent en ligne. Malgré la révolution numérique, le print reste très efficace. Nos clients prennent leurs décisions en fonction des coûts et du rendement. Pour certains messages ou certaines marques, la balance penche toujours du côté du print, c’est aussi simple que cela. Ce qui est difficile pour de nombreux clients, c’est d’intégrer différents canaux pour faire passer leur message. Une bonne communication par du content marketing doit passer par différents canaux, mais dans la pratique il y a encore parfois des accrocs. »
Anne Thys : « Les budgets passent du print au multicanal, avec au moins un canal push et un canal pull. Le push, c’est le print, et le pull, ce sont les canaux numériques. Pour Audi, nous réalisons un magazine papier deux fois par an comme loyalty tool pour les conducteurs Audi existants. De plus, nous avons mis sur pied un content hub numérique où l’on publie des articles et des clips vidéo plus fréquemment. Pour Suez aussi, le numéro un en gestion de déchets, nous avons moins de matériel imprimé et plus de contenu numérique que les années précédentes. Ce qui est frappant, c’est que la communication interne ou business-to-employee continue de se faire par des magazines ou autres supports imprimés. McDonald’s fait office d’exception à la règle et a abandonné son magazine papier il y a plusieurs années, au profit de sa plateforme numérique pour laquelle nous fournissons du contenu. Les canaux numériques ont le grand avantage d’être en contact 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 avec le client. Ce n’est pas possible avec des canaux classiques. Cette expérience 24/7 devient incontournable. »

Quels grands défis se profilent à l’horizon ?

Anne Thys : « Premièrement, trouver les bonnes personnes pour la production d’un contenu fort. Un journaliste doit être un caméléon de la créativité, il doit non seulement écrire des textes, il doit aussi savoir travailler le son et l’image. L’account manager est un coordinateur, mais aussi un rédacteur en chef. Deuxièmement, démontrer le retour sur investissement constitue un autre défi. C’était déjà le cas par le passé. Cela étant dit, grâce à Google Analytics et autres instruments de mesure, il est devenu plus facile de présenter les résultats précis d’une campagne. Nous savons combien de fois les gens ont cliqué sur une newsletter, ce qu’ils ont lu exactement, combien de temps ils sont restés sur une page… Nous voyons immédiatement ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, alors qu’avant, il fallait un peu se fier à nos instincts. »
Hans Faelens : « Outre l’intégration de différentes plateformes en un tout cohérent, pour moi le grand défi réside surtout dans la personnalisation et la contextualisation du contenu. Elles en sont encore à leurs balbutiements, mais elles évoluent vite. »
Gilles Van Lembergen : « Les agences de content marketing doivent pouvoir évoluer et innover pour justifier leur existence. Nous avons adapté notre structure interne aux nouveaux besoins et aux nouvelles attentes du marché. Aujourd’hui, nous travaillons par tribes, des équipes pluridisciplinaires où sont représentées les différentes disciplines nécessaires. Une tribe compte un directeur créatif, un designer, un analyste de données et un stratège CRM dans ses rangs. Cette collaboration augmente la rapidité et l’efficacité. »

 


Custo, qué ?

Custo est l’association professionnelle des agences de custom content et de content marketing et fait partie de l’ACC (Association of Communication Companies). Custo suit de près les tendances et l’évolution du custom content et du content marketing en Belgique et à travers le monde, en tant que membre du International Content Marketing Forum (ICMF).