Le DM optimiste

Articles traduits

Bien que la part des investissements consacrée au direct marketing aurait diminué de moitié en 18 ans, les parties prenantes à l’univers du DM gardent le sourire: tous continuent à croire en son efficacité et observent une relance de l’intérêt des annonceurs pour ces outils.

Insaisissables et mystérieux, les chiffres liés au direct marketing (DM): regroupés parfois dans le below-the-line sans plus de détail, n’incluant pas toujours les mêmes outils, isolant les tactiques digitales, ou intégrant le télémarketing, les SMS, les coupons,... Un gouffre comblé par la Solvay Brussels School: selon son rapport Marines, sur les investissements marketing de 2011 en Belgique, la part des budgets en DM serait passée depuis 1994 de 10,38% à 5,07%. Alors que le total aurait lui augmenté en 18 ans de 17 % à 5,681 milliards « C’est que le secteur ne va pas si mal que ça! Je me serais attendu, inflation comprise, à ce qu’il y ait une contraction des budgets de communication. Il y a peut-être eu une contraction, et maintenant, ça remonte,» constate Philippe Biltiau, professeur à la Solvay Brussels School. La baisse ne concernerait pas que le DM mais tout le below-the-line qui aurait chuté de 63,3% en 1994 à 35,7%. Une extrapolation à deux milliards d’euro, dont la moitié serait consacrée aux « promotions consumer ». 27,9% irait au DM, soit une estimation de 288 millions en 2011, contre 500 millions en 1994. Première explication de cette baisse: « le périmètre de l’étude,» nous explique Philippe Biltiau. « Les réductions à la distribution et les coupons n’ont plus été pris en compte ». A quoi s’ajouterait « l’évolution au niveau de l’internet et des média virtuels ». Cette différence méthodologique s’accompagnerait non pas d’une perte d’intérêt pour le DM mais d’une évolution du média. « Avant, en 94, tous les mailings comprenaient lettre, brochure, mise sous pli, enveloppe, timbrage… Maintenant inutile de dire que tout cela est remplacé par la recherche d’un bon fichier d’adresses e-mail et l’envoi d’un e-mail en couleur avec brochure en pdf. »

Le secteur ne va pas si mal que ça! Philippe Biltiau
L’impact financier de ce passage au digital est facilement imaginable: « En 2002, 2003, quand le netverising s’est imposé, tout ce qui est e-CRM s’est développé au détriment du DM papier. Il y a eu des transfert de programmes qui jusqu’il y a 10, 12 ans étaient plutôt prévus sous forme de courrier, » remarque Bruno Liesse, directeur de l’agence Deepblue: « Le digital one-to-one est beaucoup moins cher: avec 30.000 euros, on peut faire une campagne, alors qu’un direct mailing de 100.000 adresses, à 2 euro le contact, ca revient à 200.000 euros.» A cette baisse s’ajoute aussi une pression sur les prix  plus forte, comme le souligne  Philippe Arnauts, Marketing Manager de Bisnode: « Chaque location d’adresse e-mail est fort négociée, les annonceurs regardent de plus en plus pour avoir le fournisseur le moins cher.» Il a pu observer que, mise à part pour des actions ponctuelles, les annonceurs étaient encore frileux face à ces médias plus complexes et moins bien maitrisés par les marketeers. « J’ai l’impression que ceux qui avaient déjà un programme one-to-one ont continué à investir dedans, mais mettre en place un système CRM, c’est un budget important. Les annonceurs n’ont pas réussi à libérer cet investissement initial à cause de la crise. Ils ont visé du court-terme, du promotionnel plutôt que l’entretien d’une relation long terme avec le client ou prospect, parce qu’on n’en voit pas tout de suite la rentabilité. »
Chaque location d'adresse e-mail est fort négociée - Philippe Arnauts
Le top 5 des annonceurs
Parmi les entreprises qui ont investi dans le DM en 2011, notons à la première place le secteur des médias, avec 37.587.000 euros, suivi de l’Automobile (28.671.857 euros), le secteur Beauté et hygiène (21.934.329 euros), la Distribution (18.440.000 euros), puis les Banques et Assurances avec un peu moins de 10 millions. « On n’a pas l’impression qu’un secteur est plus touché par la crise. L’évolution est normale, ça change plutôt en fonction des événements: Dans le fundraising par exemple, c’est fort lié à des problèmes humanitaires,» nous dit Philippe Arnauts. Si ces entreprises continuent à investir, c’est parce qu’elles sont conscientes des atouts de ce média impactant. «Le DM coûte plus cher au contact mais est plus probant: les consommateurs hésitent à deux fois avant de jeter le folder à la poubelle,» analyse Bruno Liesse. « Et il reste de loin le premier véhicule qui génère du trafic dans les points de vente de la moyenne et grande distribution.» L’autre grande force du one-to-one serait fortement lié à sa capacité à cibler plus efficacement: « Avec la digitalisaton de la société, le consommateur laisse de plus en plus de traces digitales, des data qui permettent de le profiler mieux: on peut savoir qui a besoin de quoi, à quel moment, et lui donner les offres qui lui conviennent, » se réjouit Philippe Arnauts.

Un futur prometteur
La tendance des dernières années serait à la hausse. « Depuis l’année passée, on constate une remontée du DM aussi bien offline que online, mais difficile de dire, si c’est lié à notre restructuration interne ou au marché. » explique Philippe Arnauts. Tendance confirmée dans l’étude de Deepblue « Belgian Marketing Communications Industry Trends» dont 59% des interviewés prévoit une stabilité et 21% une croissance de leurs dépenses en below-the-line. « Je pense qu’en BtoB et BtoC, le DM a encore de beaux jours devant lui, » annonce Bruno Liesse.  Depuis deux, trois ans, les annonceurs se réintéressent au DM papier et le folder non-adressé progresse pas mal. Ca va continuer car les média de masse montrent leur limite et se fragmentent tellement qu’ils ont de plus en plus de difficultés à avoir une masse critique. »
Et finalement, l’avantage du DM deviendrait son coût, plus économique de part une plus forte segmentation. « Il ne faut pas une cible trop massive sinon ca n’a pas de sens de faire du DM: Danone avec Activia ne s‘intéresse pas à huit millions de personnes mais à quelques centaines de milliers. C’est la condition pour que le DM reprenne ses lettres de noblesse, » ajoute Bruno Liesse. C’est à la même conclusion qu’est arrivée l’enquête « Yearly Marketing Survey #2013 » réalisée par The House of Marketing: c’est pour le DM que les marketeers sont le plus optimistes, et c’est le digital qui l’emporte haut la main, 75% des répondants envisageant de consacrer une part de leur budget dans l’e-mailing, qui augmenterait de 45%. Le direct mail s’en sort très bien aussi avec une hausse 16%. Si ces sommes grimpent, ce sera aussi probablement suite à une nouvelle évolution du DM. «Avant, les annonceurs n’avaient pas assez de données, ils venaient chez Bisnode pour trouver des prospects, enrichir leur base de données, » explique Philippe Arnauts. « Maintenant, ils veulent des solutions de business intelligence: on va les aider à segmenter, analyser, transformer cette masse d’info pour leur permettre de prendre des décisions sur base de ces données. C’est une tendance internationale et européenne. » Des perspectives plutôt réjouissantes!

Le DM coûte plus cher au contact mais est plus probant - Bruno Liesse