Lessons that will make your life and career... « Mon mode d’emploi s’appelle L’Art de la guerre »

Une conversation avec Wendy Clark, CEO de DDB Worldwide, North America
A partir de ce numéro de PUB et jusqu’à la fin de l’année, PUB vous présentera un entretien avec les personnalités les plus influentes du paysage mondial de la publicité à chaque numéro. C’est Wendy Clark qui ouvre le bal. Malgré les réticences de son entourage, Wendy Clark, grande prêtresse du marketing chez Coca-Cola, a décidé de se lancer dans le monde de la publicité. Elle est devenue CEO de DDB North America et a été nommée Executive of the Year par AdAge. - Gijs de Swarte

« Chaque année, les clients demandent plus de rapidité, plus d’efficacité et plus de qualité dans le travail. En tant qu’agence, vous avez des gens, des idées, et ce que j’appellerais ‘le produit’ à défaut de meilleur mot. Ma politique, dont on vante aujourd’hui tellement les mérites, est de trouver le meilleur dosage de chacun de ces ingrédients pour qu’ils contribuent le mieux possible à répondre aux besoins des clients. Nous travaillons désormais avec des équipes qui incluent des gens de chez DDB et de toutes les organisations possibles et imaginables qui peuvent apporter une pierre à l’édifice. L’account McDonald’s, par exemple, est géré par des gens de DDB, de McDonald’, mais aussi de Facebook et de Google. Jusqu’à il y a peu, impliquer des experts extérieurs à ce point-là dans le travail ne se faisait que rarement, voire jamais. »
L’Art de la guerre

« Mener ce genre de politique, est déjà créatif en soi. La créativité commence toujours par des questions de type : Est-ce possible ? Est-ce que ça pourrait être une bonne idée ? Pour cela, j’ai deux principes qui me guident depuis toujours. En premier lieu, ma mère me disait toujours : « Tu as reçu deux oreilles et une bouche, utilise-les proportionnellement. » En d’autres termes, écoute plus que tu ne parles.
Ensuite, je suis pratiquement au pied de la lettre « L’Art de la guerre », qui a été écrit vers l’an 500 avant notre ère par le Général chinois Sunzi (également appelé Sun Tzu, ndlr). Il y dit que chaque décision doit être mesurée à l’aune de cinq critères : est-ce sage, crédible et fiable, guidé par la bonne volonté, c’est-à-dire tenant compte des gens concernés – et est-ce courageux et ordonné ?
J’ai toujours scrupuleusement respecté ces orientations au cours de ma carrière, mais l’intérêt de cette philosophie est encore mieux démontré par les erreurs que j’ai commises. Je n’ai pas de problème à en parler et j’espère que cela permettra à d’autres personnes d’en tirer une leçon. Avant de travailler chez Coca-Cola, je travaillais chez le géant de la téléphonie AT&T. A l’époque, Nokia se demandait s’il serait judicieux de commercialiser un téléphone portable avec un appareil photo intégré. Ma réaction a alors été de dire qu’il fallait être complètement fou pour envisager pareille invention. Je pense que le critère de la sagesse manquait par rapport aux principes de Sunzi. »
Le courage
« Autre exemple : chez Coca-Cola, j’ai insisté pour que l’on approche un groupe cible spécifique de façon complètement inédite lors d’une campagne stratégique de grande envergure. Résultat, un flop monumental sur le marché et la risée de la presse spécialisée. L’erreur commise – ai-je bien dû admettre – était que je n’étais pas certaine de remplir tous les critères de Sunzi et que j’avais doublement misé sur l’audace de ma décision.
J’avais été audacieuse pour la beauté du geste.
Un dernier exemple : la compagnie téléphonique Cingular Wireless rejoignait AT&T. La couleur de Cingular était l’orange, celle de AT&T le bleu. Moi je me suis dit qu’on allait arrêter l’orange, parce que c’était ringard. Et puis des tests ont montré que les gens adoraient l’orange. Je n’avais pas assez tenu compte de l’avis des gens, des vrais consommateurs. Je n’avais pas assez utilisé mes oreilles. »

Les chemins battus
« Lorsque j’ai envisagé de rejoindre DDB, toutes ces leçons ne m’ont pas nécessairement guidée dans mon choix. Bien sûr, ce changement de cap remplissait tous les critères de Sunzi, mais si je suivais le conseil de ma mère et que j’écoutais attentivement mon entourage, j’entendais un avertissement très clair : ne le fais pas. Tu as un poste important chez Coca-Cola, l’une des plus grandes marques au monde, que peux-tu espérer de mieux ? Mais je me suis dit que personne n’avait jamais pu exploiter son potentiel créatif en restant sur les sentiers battus. Et puis c’est devenu une évidence, je devais absolument faire quelque chose. C’est une des leçons les plus importantes que j’ai apprises dans ma vie, et ce n’est pas de Sunzi, c’est de moi. »
 
Onderschrift:
Wendy Clark (DDB) : « Les sentiers battus n’ont jamais permis d’exploiter un potentiel créatif. » (Foto © BWP)
« L’Art de la guerre » du Général Sunzi : un excellent manuel de marketing ?
Le meilleur Coca ? Au McDonald’s… (campagne de DDB North America pour McDonald’s).
 
Streamer:
« Est-ce que ça pourrait être une bonne idée ? »