Louvain, bien plus que la Stella et les étudiants

Leuven

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Il se passe quelque chose à Louvain. Bien que la ville soit surtout connue pour abriter la KU Leuven et AB InBev, on y trouve également un secteur créatif en plein essor. Louvain a plus d’une corde à son arc pour les entreprises média et publicitaires. 

LeuvenLorsque l’on parle de Louvain, on pense plutôt aux étudiants qu’aux maisons de production et aux agences publicitaires. Mais cela va peut-être bientôt changer. La capitale du Brabant flamand abrite en effet un nombre surprenant d’entreprises créatives. On y trouve les sociétés de production Hotel Hungaria, Bonka Circus, Borgerhoff & Lambrichts, Nieveranst, RedPepperMedia et Red Dust, pour n’en citer que quelques unes. Le secteur de la communication et de la publicité n’est pas en reste, avec notamment Boondoggle, There, Kunstmaan, Make Lemonade, Talk of the Town en Wieni – et on en oublie certainement. « Il se passe beaucoup de choses à Louvain. Beaucoup de petites entreprises créatives posent leurs valises ici. Ce sont les nouveaux visages du secteur. Avant, le paysage de la production était dominé par quelques gros poissons, aujourd’hui, il y a beaucoup plus de petites sociétés, » explique Nico Van de Velde, co-fondateur et directeur créatif de Hotel Hungaria. Sa maison de production partage un lien particulier avec la ville de Louvain car son émission télévisée la plus populaire, Dagelijkse Kost, est tournée dans le centre de la ville et son animateur n’est autre que le Louvaniste Jeroen Meus.

Hotel Hungaria_Nico Van de Velde

« L’un des atouts de la ville, c’est sa situation » poursuit Nico Van de Velde. « Nous nous sommes installés à Louvain lors de notre fondation, il y a sept ans. Nous avons choisi cet endroit car il est très facile d’accès. Nos clients se situent principalement à Vilvoorde (Medialaan), Leeuw-Saint-Pierre (VRT) et Diegem (VIER), des endroits facilement accessibles depuis Louvain. » « Nous avons dans notre équipe des gens qui viennent du Limbourg, du Brabant flamand et de Wallonie et pour qui c’est très pratique de venir ici, » intervient Heidi Carlens de There. « J’ai moi-même passé de nombreuses années à subir les embouteillages bruxellois, mais on remarque que la nouvelle génération n’a aucune envie de faire la même chose, » ajoute la managing director de There. « Être à Louvain n’est plus un désavantage compétitif, c’est même devenu un avantage. Il n’est plus nécessaire d’être à Bruxelles pour faire preuve de professionnalisme, » renchérit Fien Paepen, COO de Boondoggle.

Boondoggle_Fien Paepen

Silicon Valley sur canal

 

Une grande partie des entreprises créatives de Louvain se situe sur le Vaartkom, un ancien site industriel au coin du Canal et de la Dyle qui est en train de trouver un nouveau souffle. Hotel Hungaria et Boondoggle y sont notamment établis. Ce dernier est dans De Hoorn, l’ancienne brasserie Stella Artois, où l’on trouve désormais des bureaux et un incubateur pour les start-ups de gaming et de digital entertainment. Il y a également des cafés (Café Entrepot, Café De Hoorn), des restaurants (NoordOever) et des magasins de design (Dijk3) dans cette partie de la ville, ce qui lui donne un charme particulier.
Le Vaartkom est en passe de devenir un hub créatif, la Silicon Valley de Louvain, en quelque sorte. C’est pour cette raison que la ville a récemment fait l’acquisition des Moulins de Orshoven. « La ville veut créer des espaces qu’elle mettra à disposition de l’industrie créative, des start-ups et des entreprises culturelles. Elle va prévoir des infrastructures pour cela et pratiquer des prix démocratiques, » explique Heidi Carlens de There.

Et ça ne s’arrête pas là. Sous le nom de Vaartopia, la ville a toute une stratégie pour renforcer l’activité culturelle et créative du Vaartkom. Après les Moulins, la ville veut acquérir la Distillerie, un ancien bâtiment d’InBev, pour en faire un incubateur pour jeunes entreprises et artistes. « Les négociations sont toujours en cours, mais l’engagement de la ville est clair, » dit Toon Manders, co-coordinateur du projet De Hoorn et conseiller auprès de la ville. « La ville veut faire du Vaartkom le quartier créatif de Louvain. Les bases sont déjà jetées, avec De Hoorn, la maison d’art OPEK (qui abrite des organisations culturelles telles que fABULEUS, Mooss et Artforum) et les ateliers artistiques de Cas-co. L’intention est de développer tout cela pour lancer une dynamique. Outre les projets des Moulins et de La Distillerie, nous voulons agrandir De Hoorn de 5.000 mètres carrés, qui serviront principalement d’incubateur et de bureaux collectifs. »

Ce n’est pas une mauvaise idée, car il manque toujours de place, remarque Nico Van de Velde. « Après Red Pepper, nous étions dans les premiers à nous installer ici, suivis par nos concurrents – et néanmoins collègues – de De chinezen et Bonka Circus. Malheureusement, certains ont dû partir à cause d’un manque de place provoqué par des travaux de rénovation. De chinezen sont partis pour ça, tout comme Absoluut et Ded’s It. »

 

Un havre de créativité

 

L’acquisition des Moulins de Orshoven est un signal clair de la ville, mais ce n’est pas le seul. Le secteur créatif a trouvé sa place aux côtés de ‘health’ et du ‘high tech’ parmi les trois piliers de Leuven Mindgate, une campagne de branding combinée à une plateforme de coopération grâce à laquelle la ville entend gagner ses galons de meilleure région pour la connaissance, la santé, le high tech et (désormais) la créativité. Elle organise des évènements de networking, prévoit des espaces pour les créatifs et les start-ups et soutient le secteur. « Le secteur créatif de Louvain est un domaine sur lequel la ville peut agir. C’est pour cela qu’elle met les bouchées doubles pour rendre Louvain incontournable, » conclut Heidi Carlens.

« Avant, à Louvain, en tant qu’agence créative, vous faisiez cavalier seul. Aujourd’hui, le secteur créatif, le secteur de l’innovation et la ville sont sur la même longueur d’onde. Cela fonctionne, et cela fait de Louvain un choix logique pour une entreprise créative, » explique Fien Paepen. Les autres sont d’accord avec elle : « Je suis heureux que les choses bougent. On porte davantage d’intérêt et d’attention au secteur créatif, ce qui, à son tour, attire des gens créatifs et rend la ville plus vivante, » explique Wim Vanhaeren (Kunstmaan).

La présence de maisons artistiques et culturelles fait évidemment de Louvain un havre pour l’industrie créative. Là aussi, les choses ont beaucoup changé ces dernières années, explique Mike Naert, directeur artistique de la salle de concert Het Depot. « Il y a 15 ans, nous n’avions pas tout cela. Il n’y avait pas de Museum M, pas de Het Depot, ni d’OPEK… Même les maisons artistiques les plus actives, comme le STUK, n’étaient pas aussi présentes. L’évolution de ces dix dernières années est vraiment phénoménale et le rôle qu’a joué la ville ne doit pas être sous-estimé. La ville a joué un rôle de catalyseur en investissant dans les infrastructures. » C’est ce qui se passe aujourd’hui dans le (nouveau) secteur des médias et de la publicité.
La Flandre, KBC et l’université

 

Mais la ville n’est pas la seule à stimuler l’industrie créative de Louvain. Flanders DC, l’organisation des autorités flamandes qui promeut et stimule la créativité des entreprises est installée ici et Start It @ KBC est un hub important à Louvain. Ces deux initiatives assurent des interactions avec le secteur : Flanders DC en organisant des évènements et des ateliers ; KBC en collaborant avec des agences telle que Kunstmaan. « Nous sommes partenaire de Start It @ KBC, ce qui signifie que nous accompagnons les start-ups. Chaque mois, nous organisons pour elles un ‘Café Communication’ où elles peuvent échanger des idées avec nos experts pendant une petite heure. C’est ainsi que l’application très prometteuse de commandes pour la restauration, Tsjing, a fait un petit tour par nos bureaux, » dit Wim Vanhaeren.

Un autre atout de Louvain, c’est la présence de la KU Leuven et de différentes hautes écoles, qui assurent la présence de jeunes talents dans la ville. « Chaque année, nous avons un afflux de bons stagiaires, et nous en engageons généralement un par an, » dit Heidi Carlens. De nombreux étudiants diplômés cherchent du travail dans la région de Louvain, ce qui rend l’embauche plus facile pour nous, ajoute Fien Paepen. C’est surtout pour les profils techniques, sur lesquels mise justement Kunstmaan, que la présence de l’université et des hautes écoles est particulièrement appréciée, pense Wim Vanharen : « Nous avons également d’excellentes relations avec l’UCLL (les hautes écoles louvanistes liées à la KUL), où nous ne manquons pas d’assister aux journées de l’emploi et dont proviennent de nombreux stagiaires. »

 

Collaborations

On l’aura compris, il y a beaucoup de disciplines créatives différentes à Louvain. « Nous sommes complémentaires, car nous ne faisons pas tous la même chose, » dit Heidi Carlens. Par ailleurs, Fien Paepen fait remarquer que l’on entre facilement en contact avec les gens des autres agences, par exemple dans les cafés, ce qui permet d’établir des relations qui n’auraient pas été possibles dans une grande ville : « De plus, nous avons dans nos bureaux un espace de travail central où peuvent s’installer les ‘nomades’ pendant quelques heures ou quelques jours. Cela nous permet d’étoffer notre réseau et de nous ouvrir à de nouvelles collaborations. »

Nico Van de Velde espère qu’il y aura encore plus de collaborations à l’avenir. « Dans un petit secteur, il est important de se rencontrer. De temps en temps, il faut coopérer pour survivre. Bien que nous soyons concurrents, nous devons parfois unir nos forces pour faire face à des géants américains tels que Netflix et Facebook. Nous avons déjà fait toutes sortes de co-productions et j’espère qu’il y en aura encore plus à l’avenir, » conclut le directeur créatif de Hotel Hungaria.