Maman, pourquoi découpe-t-on ?

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Nous, Belges et... rois des bons de réductions

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Comment le Belge moyen s’est-il imposé comme champion européen de l’art noble du « couponing » ? Nous avons posé cette question épineuse sur les bons de réduction, les e-coupons, les promotions « on-pack » à Willem Stox, sales director chez HighCo DATA Benelux (et dès fin septembre, Country Director Belux de Royal Auping).
À la tête de HighCo DATA Benelux, Willem Stox ne pourrait pas être mieux placé pour répondre à nos questions sur le couponing. En effet, l’entreprise pour laquelle il travaille est une grand spécialiste en la matière. Depuis 2010, HighCo DATA a traité pas moins de 600 millions de coupons, aussi bien papier que dématérialisés. Elle les analyse à l’échelle internationale et nationale jusque dans les moindres détails et, chaque année, HighCo DATA Benelux présente un rapport particulièrement intéressant sur le couponing – que nous ne manquons pas de citer à l’envi.
Champions européens du couponing
En chiffres absolus, la Belgique arrive sur les premières marches du podium européen du couponing, juste derrière la France. En France, ce sont quelques 370 millions de coupons qui ont été échangés l’année dernière, contre 87 millions en Belgique et 27 millions en Allemagne. En ce qui concerne le nombre de bons de réductions utilisés per capita, notre pays bat cependant tous ses voisins : le Belge découpe 6,43 coupons par personne, contre 5,61 par Français et 0,44 par Allemand. Les Belges ont ainsi économisé pas moins de 720 millions d’euros grâce aux bons de réduction depuis 2010.

Willem Stox

Willem Stox - HighCo DATA Benelux


Pourquoi le couponing est-il si populaire dans notre pays ? « Tout d’abord, en Belgique, les détaillants acceptent les bons de réduction des fabricants, » répond Willem Stox. « C’est la condition la plus importante. Un bon de réduction est en réalité une réduction ou une promotion qui est décrétée par le fabricant mais qui est octroyée au consommateur par le détaillant. Sans cette condition essentielle les réductions nationales des marques seraient tout simplement impossibles. Dans d’autres pays, comme aux Pays-Bas ou en Grande-Bretagne, ce sont les détaillants qui émettent les bons, ce qui fait qu’il est impossible d’avoir des réductions à l’échelle nationale. Les fabricants doivent bien évidemment croire aux bons de réductions en tant qu’instrument promotionnel. Enfin, les consommateurs doivent également y croire et les utiliser véritablement. » En Belgique, c’est très certainement le cas. En moyenne, dans notre pays, le coupon redemption est de 20%. Les on-pack coupons, c’est-à-dire les coupons sur les emballages représentent 37% ; les in-store coupons, 20% ; le direct mailing ciblé, 15% ; les webcoupons ou e-coupons 8% ; et les coupons dans les dépliants, dans la presse ou les journaux régionaux gratuits, 5%. Les bons placés sur les emballages sont les plus populaires auprès des fabricants. Ils leur coûtent nettement moins de marge que, par exemple, les coupons dans les dépliants. Chez le consommateur belge, le couponing est populaire tout court. « Il est bien connu que les Belges adorent économiser et collectionner, » résume Willem Stox. « C’est pourquoi les bons de réductions fonctionnent particulièrement bien en Belgique. »

« Le digital ne prend pas en Belgique. »

HighCO DATA remarque des différences notoires au sein de la Belgique. Par exemple, les provinces de Liège, Namur et du Luxembourg sont, avec un indice de 121%, les plus grandes utilisatrices de coupons, suivis par le Hainaut et le Brabant wallon. Les Flandres orientale et occidentale, avec leur indice de 108%, sont légèrement au dessus de la moyenne. Le Limbourg, Anvers et le Brabant flamand, avec un indice de 100%, se retrouvent pile dans la moyenne de 6,43 coupons per capita. C’est Bruxelles qui ferme la marche, avec un indice de 90%. « En Flandre, la plupart des bons de réduction sont utilisés », nuance Willem Stox, « C’est là que se trouve la plus grande concentration d’habitants et donc de distributeurs. En ce qui concerne la valeur des bons par famille, c’est la Wallonie qui est en tête. Il n’y a pas vraiment de raison concrète qui explique cela. Mais il se pourrait que l’une des raisons soit que le pouvoir d’achat par famille est plus faible en Wallonie qu’en Flandre. »

Les grandes tendances

Le nombre total d’actions comprenant des coupons est resté stable l’année passée par rapport à l’année précédente. Il y a cependant des tendances qui se dégagent d’année en année. Par exemple, la part des produits alimentaires a légèrement augmenté et a atteint 72%. Les produits laitiers restent d’ailleurs la catégorie qui a les meilleurs résultats. De prime abord, on pourrait certainement penser que la coupe du monde de football a joué un rôle. « Mais là, les promotions sont plutôt passées par d’autres canaux que les bons de réductions, » rectifie Willem Stox. « Ce sont surtout les actions de Diageo qui ont eu un impact. » L’engouement pour le gin et le whisky a également joué un rôle important dans la catégorie food.
Dans la catégorie non-food, les promotions health & care ont eu le vent en poupe l’année dernière, particulièrement aux rayons dentifrice et poudre à lessiver. Les Unilevers et Procter & Gambles de ce domaine ont été particulièrement actifs. Willem Stox n’a pas d’explication immédiate à cela. « Le dentifrice et les poudres à lessiver sont bien évidemment les produits de prédilection pour atteindre la ménagère. De plus, les montants en jeu dans la catégorie des poudres à lessiver sont importants car le prix par produit est très élevé. Proportionnellement, les promotions par produit ont un impact important. » Les coupons sont des outils puissants pour susciter le brand switching, c’est-à-dire, pour encourager les consommateurs à changer de marque.

« Nous, les Belges, sommes un peu plus classiques que nos voisins. »

Quoi qu’il en soit, la part des promotions sur le volume et le prix augmente de façon stable. L’année passée, elles constituaient exactement trois quarts – 75% – des insertions. La guerre des promotions fait rage, si bien qu’il devient de plus en plus difficile pour les marques de se différencier de leurs concurrents. Une autre tendance qui se dégage visiblement, c’est celle que l’on appelle multiple buys. « Les fabricants essaient d’optimiser leurs investissements dans les bons de réductions, » explique Willem Stox. « C’est pour cela qu’ils proposent au consommateur, par exemple, une réduction de 5 euros à l’achat de trois produits. Ils essaient de remplir leur panier plus rapidement. Ce que favorisent les multiple buys. »

Digital

Le e-coupon, ou webcoupon, a connu une croissance de 30% entre 2013 et 2014, mais reste, avec 1,3%, le maillon faible des coupons. « L’année passée, nous avons reçu environ 1,3 millions de coupons, » précise Willem Stox. « Le digital ne prend pas en Belgique. C’est un mystère pour nous. Nous supposons que les fabricants ont encore du mal à se jeter à l’eau. Ils misent bien trop peu sur le numérique. En France, les bons de réductions numériques représentent déjà 8%. Les consommateurs belges ont peut-être également moins tendance à consulter les sites internet des marques au préalable, or c’est là que se trouvent les bons. Les consommateurs français le font plus facilement car ils doivent parcourir de plus grandes distances pour aller faire leurs courses. Enfin, nous, les Belges, sommes un peu plus classiques que nos voisins. L’e-commerce non plus n’a pas encore vraiment pris son envol en Belgique. » Ce qui est remarquable, ce sont les résultats de Colruyt en matière de webcoupons. L’année dernière, 41% des e-coupons échangés dans notre pays étaient chez ce détaillant. C’est d’autant plus remarquable que la part de Colruyt pour les coupons n’est que de 26%.

La Belgique, un pays de découpeurs de coupons

Couponing Carrefour

Baptiste van Outryve (Carrefour) : « Les points bonus sont beaucoup plus importants que les coupons dans notre politique générale de promotion. »


Baptiste van Outryve n’explique pas le succès des coupons dans notre pays. Mais le directeur PR & Corporate Communication de chez Carrefour Belgique y voit une vraie tradition nationale. « Notre pays a toujours été le pays des coupons, » constate-t-il. « Nous adorons jouer à cela. Nous menons nous-mêmes, chez Carrefour, trois formes de promotions. Il y a tout d’abord les prix barrés que nous offrons aux clients. Ensuite, nous distribuons les coupons des marques. Et enfin, nous offrons des points bonus sur certains produits. » Mais si l’on y regarde de plus près, les promotions chez Carrefour se limitent aux marques de la maison. Le couponing n’a pratiquement lieu que sur des marques nationales.
Pour les détaillants belges, les coupons sont en effet (bien) moins importants que pour les marques nationales. « Elles veulent mettre en valeur leurs produits, indépendamment du magasin, » explique Baptiste van Outryve. « Elles veulent s’inscrire dans les top of mind. Pour nous, les coupons font effectivement partie de la politique globale de promotion, mais dans ce domaine, les points bonus sont beaucoup plus importants pour nous. » C’est ainsi que Carrefour & co. offrent de petits extras à leurs clients et les encouragent à … revenir satisfaits. C’est d’autant plus important que, chaque année, Carrefour atteint trois quarts des familles qui font leurs courses en grande surface en Belgique. La carte bonus et le programme de fidélité jouent également un rôle essentiel dans la politique de promotion de Carrefour. « Les coupons sont plutôt l’outil de promotion d’une marque que d’un détaillant, » souligne Baptiste van Outryve.

Promotions sur mesure

Colruyt est le pionnier et le champion européen des promotions sur mesure. Ce distributeur basé à Hal diffuse 2,4 millions de dépliants toutes les deux semaines. « Les clients s’inscrivent pour ça, » explique le marketing manager Bart Van Lierde. « 1,6 million de clients reçoivent une liste de courses personnalisée – un dépliant personnel avec des coupons qui sont valables pour tout le monde mais qui sont sélectionnés pour eux. En d’autres termes, la différence se situe dans la communication, pas dans la validité des coupons. Sur nos 2,4 millions de dépliants, 1,6 sont personnalisés. » Tous les clients ne reçoivent pas automatiquement des coupons sur mesure. Bart Van Lierde souligne cette nuance : « Notre système n’est pas basé sur la fidélité des clients. Nous ne récompensons pas les clients parce qu’ils sont considérés comme ‘bons’ clients, comme cela se fait dans le secteur des télécoms. Nous leur proposons des coupons personnalisés sur base de leur pertinence. » La pertinence est de loin le mot-clé de la politique de promotion de Colruyt. « La pertinence ne cesse de gagner du terrain, » explique Bart Van Lierde. « Nous vivons dans un monde où la masse d’informations croît constamment. Or, nous avons de moins en moins de temps disponible pour traiter toutes ces informations. Nous sommes donc convaincus que nous devons rendre notre communication la plus pertinente que possible pour nos clients. C’est pourquoi notre communication ne contient pas uniquement des promotions, mais aussi du contenu. Nos dépliants sur mesure comprennent plusieurs documents qui sont personnalisés un à un sur base de l’utilisation individuelle. Par exemple, les familles avec enfants reçoivent d’avantage d’informations sur des produits utiles pour enfants et bébés, alors que les familles sans enfants ne reçoivent pas ces informations. Ils les trouveront en ligne, mais pas sur papier. Dans le même temps, l’aspect des coûts est évidemment important dans notre politique promotionnelle. En personnalisant, nous faisons de grandes économies sur la communication. Rien que pour le papier, nous économisons déjà 600 millions d’euros par an. »
Colruyt dispose de deux presses digitales pour imprimer ses dépliants individuels. La sélection en tant que telle est presque entièrement automatisée. Dans le département marketing, une trentaine de personnes travaillent à la personnalisation des offres. Bart Van Lierde, en tant que chef du département marketing, dirige la politique de promotion de Colruyt autour des prix les plus bas : « Avec mes collaborateurs, je m’assure que les clients reçoivent le dépliant dans leur boîte aux lettres toutes les deux semaines. »