Miser sur l’expérience

Miser sur l'expérience - Exodus - pub8-2014

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Même si le cinéma n'est pas un média comme un autre – il ne connaît ni les aléas de la périodicité, ni ceux de l'actualité – il n'en demeure pas moins touché par la numérisation de la société. S'il a bien intégré la donne sur le plan de sa communication, il devra encore faire preuve de créativité pour que ses habitués ne lui préfèrent pas des séances en streaming, calés dans un divan moelleux.

 

Miser sur l'expérience - Exodus - pub8-2014

Exodus (Fox) sortira dans les salles le 17 décembre

L'ours Paddington (Belga) s'invite pour la Saint-Nicolas. Les peluches seront au rendez-vous

C'EST UN SECTEUR UN PEU ROCK'N ROLL. Deirdre Keustermans

Dans cette partie, se retrouvent face à face les exploitants de salles, tels que Kinepolis, UGC, Euroscoop... et les distributeurs, chacun organisant ses activités à la carte. Ainsi le tandem Fox / Warner a un pôle marketing affecté à la distribution de ses propres films et d'une brochette d'autres. L'équipe, sous la direction deDeirdre Keustermans, gère exclusivement le volet sortie dans les salles pour la Belgique et le Luxembourg. Du côté de Belga, la gestion marketing Benelux, pilotée par Anny Schmit, s'opère à 360°: «  Nous gérons tous les droits, mais rarement les droits dérivés qui sont généralement entre les mains des producteurs. » Chez Walt Disney Studio Motion Pictures, qui détient les portefeuilles Disney, Marvel et Lucas Films, mais aussi ABC, pour les séries télé, le marketing est horizontal, comme l'explique son CMO Serge Van Eyck: « Le cinéma est la locomotive, ainsi que tout ce que nous diffusons sur nos chaînes télé, Disney Channel et Disney Junior. Viennent ensuite les produits dérivés, que sont les vêtements, les jouets, le digital et les promotions. Notre équipe marketing de quinze personnes est horizontale avec des spécialistes verticaux. »

A CHAQUE FILM SON BUDGET

En termes d'investissements publicitaires, les films représentent une toute petite part du gâteau, avec 1,6 %. Au sein même du secteur, la crise économique ne se fait pas trop sentir. « Cela reste semblable. Nous déterminons le poids d'investissement par film. Nous ne définissons pas, par exemple, un budget annuel en télé: tout se décide à l'unité. C'est très souple. Il arrive par exemple, en fonction d'une actualité négative sur d'autres marchés, qu'il nous soit demandé de couper dans nos investissements... Ou l'inverse. C'est un secteur un peu rock'n roll!  Tout dépend de la programmation. Il n'y a pas deux années pareilles. Mais je peux déjà dire que 2015 et 2016 seront de grandes années, avec des sorties comme Avatar 2 et 3, » détaille Deirdre Keustermans. « Nous avons trois leviers de communication. Nous travaillons sur la fenêtre cinéma pour générer de la notoriété, à travers des investissements média, de la promotion et de la presse. Nous avons un PNL (Profit and Loss) pour chaque film où tout est intégré. Les investissements varient en fonction du potentiel du film. Certains films sortent sur huit copies, d’autres sur 90. Chaque cas est différent, » précise la general manager du pole Theatrical Distribution de Belga Films.

VOUS VIVEZ UNE EXPERIENCE UNIQUE. Anny Schmit

Chez Disney, malgré un nombre restreint de sorties par année – onze prévues pour 2015, contre une quarantaine pour Fox – les investissements médias sont importants. Le film est le point de départ d'une communication très aboutie. « Les salles et nos chaînes télé, Disney Channel et Disney Junior, sont les locomotives de nos produits. Les autres chaînes, comme RTL ou la RTBF sur lesquelles on retrouve nos productions, servent à optimiser nos contenus. Les contenus doivent correspondre aux profils des chaînes: 'Grey's Anatomy' ne se retrouve naturellement pas sur Disney Channel. A l'inverse, 'Violetta' sortira sur Disney Chanel et ira ensuite sur des chaînes qui ne nous appartiennent pas. Un film est le départ d'une franchise. Même s'il n'est pas un succès en salles, il peut toujours se distinguer dans les magasins! Nous voulons, à travers notre communication, que les gens aient connaissance du film, mais aussi de la franchise qui est créée. C'est ainsi que pour 'Planes 2', des personnes qui n'ont pas vu le film ont par contre acheté des produits, » raconte Serge Van Eyck. Quant au planning média, il devient de plus en plus digital. « Nous avons constaté que nos consommateurs s'informent beaucoup plus qu'avant via les canaux numériques. Selon une récente étude anglaise, voici cinq ans, 60% des consommateurs se disaient influencés par les spots publicitaires. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 30%. Par contre, 60% sont influencés par le digital à travers des canaux comme Facebook, Youtube... et de plus en plus via leur mobile. Nous sommes évidemment présents où le consommateur s'informe. » Résultat: 50% des investissements médias de Walt Disney Studio Motion Pictures se retrouvent online.

DES RÉSEAUX SOCIAUX INCONTOURNABLES

Tous les distributeurs vous le diront, la communication par les canaux « classiques » a encore de l'avenir. A côté d'une présence en télé et en affichage, l'axe promotion sur les points de vente et le licensing conservent leur importance. « Il serait intéressant de publier une plaquette avec toutes nos idées de partenariat sur les films, » plaisante Anny Schmit. « Ca commence par le product placement, l'action on pack, un axe retail... Il faut rester cohérent par rapport à la valeur du film. Le trois décembre, nous sortons 'Paddington'.

LE FILM EST LE DEPART D'UNE FRANCHISE. Serge Van Eyck

Nous surfons sur la période de la Saint-Nicolas dans les centres commerciaux. Ce petit ours véhicule des valeurs d'amitié, de voyage à Londres... Prendra-t-il le Thalys ?... » Parallèlement à ceci, l’artillerie lourde est mise en branle sur les réseaux sociaux. Fox / Warner est, par exemple, omniprésent sur Facebook et Twitter où tout est mesuré. « Nous achetons des reachboxes permettant de compter par heure l'activité des internautes. Ainsi, une bande annonce de Godzilla a enregistré 400.000 vues en deux jours, » se félicite Deirdre Keustermans. « Nous observons aussi des différences entre les néerlandophones et les francophones. Les premiers postent des 'like', tandis que les seconds postent des commentaires. Notre communication passe aussi par les mobiles, via des site comme HLN mobile, 7sur7, etc. Mon contenu est sexy, il est donc naturellement plus intéressant de le voir sur mobile qu'une pub pour des assurances ou une banque. La télévision n'est pas morte, mais elle se doit d'être combinée au social média. Tout cela est assez récent.» Sur une moyenne d'investissements online se situant entre 40% et 50%, les médias sociaux occupent une portion entre 15% et 30%.

SE RÉINVENTER

Pour certains films, la magie du cinéma génère une dimension événementielle naturelle. « Chez Disney, il est important de créer des liens au niveau local par ce biais. Les premières de 'Disney Channel On Ice' ou 'Violetta' en concert, nous permettent d'être proche des gens, » lâche Serge Van Eyck. Pour d'autres la question se pose: n'est-il pas préférable de regarder chez moi un film sur sa télévision connectée? Certains distributeurs s'inquiètent déjà de l'impact que pourrait avoir Netflix sur leurs audiences! « Il faudra voir si les jeunes préfèreront regarder Netflix plutôt que de se rendre au cinéma. En Scandinavie, ce type de consommation explose! Nous allons donc étudier comment réagir, » nous confie la responsable marketing de Fox / Warner. A ceci s’ajoute le rôle qu’entend jouer Netflix dans la production de longs métrages et leur distribution.
Pour sa part, Anny Schmit affiche un optimisme étayé. « Malgré la multiplicité des canaux de distribution, je ne crois pas que le cinéma va disparaître. Je pensais initialement à une diminution de la fréquentation des salles. Or de manière générale, sur base des Top 30 que nous recevons, elle reste stable. Il y a même des marchés en progression. Il y aura toujours des films qui attireront du public au cinéma. Les films moyens vont peut-être souffrir, mais les gens ont envie de voir les blockbusters dans la salle car finalement, c'est du spectacle. Le cinéma n'est pas voué à disparaître, il doit se réinventer et proposer une nouvelle expérience aux consommateurs, une expérience complète au spectateur. C'est ce que Belga compte offrir dans ses nouvelles salles à Liège et à Bruxelles. Dès l'entrée dans le complexe vous vivrez une expérience unique! »