« Nous nous sentons chez nous partout et nous n’avons pas peur de grand-chose. »

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Gerard et Kris Govaerts


Gerard et Kris Govaerts sont probablement les frères les plus connus du monde de la publicité. Gerard Govaerts avait lancé GV\Company avant de revendre son agence au réseau TBWA. Kris Govaerts a ensuite été l’artisan de la croissance fulgurante de l’agence belge – qui est entre-temps devenue la plus grande de Belgique.
Avant toute chose, il faut préciser que Kris et Gerard Govaerts ont vraiment travaillé ensemble plusieurs années chez TBWA. En 2003, Gerard Govaerts avait demandé à son frère de prendre la tête de TBWA Belgique, avec trois de ses collègues de son ancienne agence, Duval Guillaume. En 2009, Gerard Govaerts était parti à Miami pour y diriger TBWA Amérique latine. Mais jusqu’au printemps de cette année, il était resté président du conseil d’Administration de TBWA Belgique.

Une passion pour la communication

Par pure curiosité professionnelle, je dois malheureusement commencer par une question impolie : quel âge avez-vous ?
Kris Govaerts : « J’ai 45 ans… »
Gerard Govaerts : «… et moi 55 ans. »
Kris Govaerts : « Il ment, il en a 56, mais il ne veut pas l’admettre. » (rires)
Vous avez une passion commune pour la communication. Gerard, vous travaillez toujours dans le monde de la publicité ?
Gerard Govaerts : « Je suis parti de TBWA Bruxelles le 1er juillet de cette année. Pour l’instant je travaille ave des start-ups en Belgique et en Afrique. Je me concentre sur internet, les médias et la publicité. J’ai par exemple une agence publicitaire en Tanzanie avec André Plaisier comme directeur créatif. Je suis également en train d’ouvrir une deuxième agence au Kenya. Nous essayons d’ouvrir une chaîne d’agences en Afrique, car je suis persuadé que le continent africain est the next big thing. J’ai déjà mené un projet comparable pour TBWA en Amérique du Sud où j’ai été président pendant trois ans. »
Kris Govaerts : « Gerard est maintenant indépendant. »
Gerard, selon LinkedIn, vous êtes devenu private investor.
Gerard Govaerts : « Je ne me décris pas vraiment comme private investor, mais plutôt comme active investor – parce que je suis très actif. »
Kris, vous êtes président de TBWA Western Europe depuis mars.
Kris Govaerts : « Oui mais c’est un titre idiot. Je supervise huit pays, mais cela ne représente qu’une infime partie de mon temps. Les autres pays de TBWA Western Europe ont tous un CEO, tout comme je suis le CEO de la Belgique. TBWA a connu un énorme succès en Belgique ces dix dernières années et les autres pays de TBWA en Europe occidentale essaient de nous emboîter le pas. C’est pour cela que l’on m’a demandé d’être le président de TBWA Western Europe, on m’a donné ce poste sur base des mérites de la Belgique. Mais je suis surtout actif à l’échelon local. »
Gerard Govaerts : « Nous avons toujours eu une mentalité très ouverte. Nous n’avons jamais été belgo-belges. Ni limbo-limbourgeois, puisque nous venons de Tessenderlo. (Rires) À l’époque de mon agence, GV\Company, par exemple, je travaillais déjà avec Chiat\Day. Et Kris, après un stage chez Vlerick, a travaillé six mois chez Chiat\Day à Los Angeles. Nous sommes toujours resté ouverts à d’autres gens. »
IT RUNS IN THE FAMILY_Govaerts brothers_D403542C’est peut-être une caractéristique belge ?
Gerard Govaerts : « Nous sommes un petit pays… »
Kris Govaerts : « Ce qui fait que nous devons voir les choses en grand. Quoi qu’il en soit, c’est super de pouvoir faire partie du réseau Omnicom. Nous étudions d’ailleurs tous les deux à la Omnicom University. »
Gerard Govaerts : « Malgré nos dix ans d’écart. »
Pourquoi avez-vous tous les deux décidé de travailler dans le secteur de la publicité ?
Kris Govaerts : « Déjà du temps de mes études, j’admirais mon grand frère, qui, en fin de compte, faisait une belle carrière dans la publicité. Il est évident que d’une façon ou d’une autre, vous êtes influencé par votre famille. Donc, comme Gerard, j’ai souvent été en Afrique. Mais j’ai fait ma propre carrière. »

Deux positions de tête chez TBWA

On remarque que vous avez tout deux fait carrière chez TBWA.
Gerard Govaerts : « Cette année, cela fera en effet 30 ans que je suis chez TBWA. Les quatre premières années, j’étais l’assistant d’André Duval. Guillaume Van der Stighelen était à l’époque créatif. Ensuite, j’ai travaillé un an à Paris, où j’étais le bras droit de Tragos, Bonnange, Wiesendanger et Ajroldi de TBWA. Le lundi, c’était fusions et rachats, le mardi, stratégie, le mercredi, création. Et le jeudi, on allait manger tous ensemble, c’était le jour du relationnel. TBWA cueillait de cette façon les gens dans les pays où il était présent pour les faire tourner un an à l’international. En 1990, j’ai lancé ma propre agence, avec Bruno Vanspauwen, sous le nom de GV\Company. J’ai toujours entretenu d’excellentes relations avec TBWA et en 1999, je leur ai vendu mon agence. C’est ainsi qu’est née le nouveau TBWA, avec quelques 120 employés. Après la vente, j’ai mis un point d’honneur à toujours bien m’occuper du suivi. J’ai alors demandé à Kris et à d’autres, si je pouvais venir travailler pour la nouvelle agence. Je suis personnellement fier d’avoir lancé moi-même une agence de publicité, de l’avoir fait fusionner à un réseau et d’avoir ensuite réussi à passer le flambeau à la génération suivante. »
IT RUNS IN THE FAMILY_Govaerts brothers_D403523Avez-vous hérité cet amour de la publicité de votre famille ?
Gerard Govaerts : « Pas du tout. À ce niveau-là, je ne me rappelle que des Mainzelmännchen (des personnages animés à la Loeki de publicités télévisées allemandes, ndlr). »
Kris Govaerts : « Notre père était ouvrier et notre mère femme au foyer. »
Gerard Govaerts : « Nous avons découvert ce monde pas à pas… »
Kris Govaerts : « … enfin, moi, surtout grâce à mon frère. »
Gerard Govaerts : « L’aspect de notre secteur qui me plaît le plus, c’est le côté entreprenariat. Ce n’est pas tellement la publicité, c’est surtout l’esprit d’entreprise. »
Kris Govaerts : « Et conclure des deals ! »
Gerard Govaerts : « Je vois ce dont une personne a besoin et ce qu’une autre personne peut fournir. La façon la plus rapide de concilier les deux semblait finalement être dans la publicité. »
Kris Govaerts : « Ma carrière s’est passée autrement. Bien sûr, j’étais influencé par Gerard. J’ai choisi la communication à la VUB, et ensuite le marketing à la Vlerick Business School. Alors que je faisais un stage aux États-Unis, une agence de publicité m’a téléphoné de Belgique pour me proposer du travail (Publicis, ndlr). Ensuite, je suis simplement passé d’un job à l’autre, dans le secteur de la publicité. »

« En fait, Gerard est un Africain blanc » – Kris Govaerts

Vous inspirez-vous mutuellement ?
Kris Govaerts : « Nous avons tous deux de fortes opinions. Contre toute attente, nous avons fini par travailler ensemble. Gerard était CEO, et moi managing director. Il y avait parfois des conflits, mais nous en sommes toujours sortis. D’ailleurs, que ça soit clair : en ce moment, nous gérons l’agence avec quatre managers. Gerard reste encore et toujours notre personne de confiance. Mais en 2010, il est parti en Amérique latine. Là, la distance était bien évidemment plus grande, mais Gerard est resté actif au sein du Conseil d’administration. »
Gerard Govaerts : « En tant que caisse de résonance, dirons-nous. »
Peut-être communiquez-vous plus directement parce que vous êtes frères ?
Kris Govaerts : « Tout-à -ait. Nous nous disputons beaucoup, mais on finit toujours par boire une bière. Au final, nous sommes frères. »
Gerard Govaerts : « Oui, et en fin de compte, il faut que l’on puisse manger ensemble chez notre mère. »
Kris Govaerts : « Nous pouvons nous dire les choses très directement… »
Gerard Govaerts : « … Parce qu’au final, nous devons nous mettre d’accord. »
Kris Govaerts : « Ce qui fait que la politique disparaît. »
Gerard Govaerts : « La communication peut donc être très honnête. Je ne peux pas jouer de tours à mon propre frère, comme c’est parfois le cas en affaires. Sinon, nous ne pourrions pas travailler ensemble. Mais permettez-moi de préciser que nous n’avons travaillé ensemble que pendant deux à trois ans ! Il était évident que l’agence était entre bonnes mains. Lorsque je suis parti, l’agence comptait 120 employés, aujourd’hui il y en a 200. TBWA est devenue la plus grande agence publicitaire de Belgique.
En quoi êtes-vous différent de l’autre ?
Kris Govaerts : « Je suis sportif et Gerard pas du tout. »
Gerard Govaerts : « C’est qu’il est fier de lui ! » (Rires)
Kris Govaerts : « Personnellement, j’aime travailler avec de gros clients, comme vous pouvez le conclure de notre palmarès. Gerard est un entrepreneur et il peut parfaitement poser les bases, alors que mon équipe et moi nous nous occupons de faire quelque chose de joli. »
Gerard Govaerts : « Voilà, moi je suis meilleur en fondation et Kris en construction ! »
Vous n’êtes manifestement pas en concurrence…
Kris Govaerts : « Plus maintenant. Nous étions concurrents lorsque je travaillais chez Duval Guillaume et Gerard chez TBWA. »

Les Africains blancs

IT RUNS IN THE FAMILY_Govaerts brothers_D403560Je remarque que vous allez tous deux souvent en Afrique. C’est une passion commune ?
Kris Govaerts : « Oui, en partie. »
Gerard Govaerts : « Apparemment c’est une passion que je lui ai transmise. J’ai été en Afrique pour la première fois en 1983. »
Kris Govaerts : « Avec son amoureuse. »
Gerard Govaerts : « C’est vrai, je suivais une femme. C’est ainsi que j’ai passé un an au Swaziland, j’ai ensuite vécu à Johannesburg, en Afrique du Sud, où j’ai travaillé pour Young & Rubicam. En 1985, je suis revenu en Belgique avec ma moto. J’ai toujours cette moto, d’ailleurs. Sur LinkedIn, vous pouvez encore lire que je considère ‘on the road in Africa’ comme un ‘Master en expérience de la vie’. J’ai beaucoup appris en Afrique, et je garde une passion pour ce continent. J’ai ensuite travaillé sur des projets là-bas, tels qu’une école, un hôtel et des agences de publicité. »
Il s’agissait donc principalement d’entreprendre…
Kris Govaerts : « En effet, cela ne doit pas nécessairement être de la publicité. Gerard est un publicitaire, mais il pourrait très bien faire des affaires dans, disons, les fraises. »
D’où vous vient cette passion pour l’Afrique ?
Kris Govaerts : « Une fois que vous y avez été, vous voulez absolument y retourner. »
Gerard Govaerts : « Pour moi, l’Afrique était un choix logique. »
Kris Govaerts : « En fait, Gerard est un Africain blanc. »
Gerard Govaerts : « Et l’Afrique était mon cadeau de mariage à Kris. »
Kris Govaerts : « J’ai traversé l’Afrique avec celle qui allait un jour devenir ma femme, comme le montre l’histoire. Gerard m’avait offert une voiture pour faire ce périple. »

« Doit-on vraiment se souvenir de nous ? » – Gerard Govaerts

IT RUNS IN THE FAMILY_Govaerts brothers_D403527Vous aimez visiblement voyager tout court.
Gerard Govaerts : « Nous avons un regard ouvert sur le monde. »
Kris Govaerts : « Petits Limbourgeois que nous sommes. »
Gerard Govaerts : « Nous ne sommes pas timides. Nous nous sentons chez nous partout et n’avons pas peur de grand-chose. »
Kris Govaerts : « Cela s’est forcément traduit par une carrière internationale. »
Où êtes-vous chez vous ?
Gerard Govaerts : « En fait, nous sommes des citoyens du monde. »
Kris Govaerts : « Limbourgeois et citoyens du monde. Bien qu’en réalité, nous ne sommes plus vraiment limbourgeois. »
Gerard Govaerts : « Mais je connais toujours un chant populaire limbourgeois par cœur ! »
Comment aimeriez-vous que l’on se souvienne de vous à la fin de votre carrière ?
Gerard Govaerts : « Doit-on vraiment se souvenir de nous ? »
Kris Govaerts : « Cela ne nous préoccupe pas vraiment, mais j’aimerais que l’on se rappelle de moi comme de quelqu’un qui traitait bien ses collègues et ses clients. »
Gerard Govaerts : « Moi, j’aimerais que l’on se souvienne de moi comme quelqu’un qui a mis le pied à l’étrier à de nombreuses personnes et qui a laissé les choses en ordre derrière lui. »