« Le monde publicitaire est clos et le désir infini »

Valérie JanssensUn titre en forme de paraphrase d’un ouvrage de l’économiste français Daniel Cohen paru en 2015. Une lecture édifiante, « Le monde est clos et le désir infini »*, au détour de laquelle l’absurdité de certains paradigmes de notre métier m’est apparue dans sa lumière crue et imparable. Et soudain un besoin, presque vital, de donner du sens à ce quotidien professionnel sans cesse influencé par une révolution numérique qui ne laisse aucun répit.

C’est une prise de conscience quelque peu terrifiante qui m’a donc saisie en plein élan dans cette course menée pour évoluer au rythme des innovations technologiques : la révolution digitale est la première révolution industrielle de nature à appauvrir le monde et l’espèce humaine en général ! Elle n’est pas un vecteur de croissance, elle n’est pas un gage de prospérité. Pire, de par l’automatisation qu’elle implique, elle prive la société d’emplois jadis qualifiés pour les substituer par des profils d’encodeurs, de livreurs, d’exécutants, de nourrisseurs de machines, vidés de leur substance et de leur expertise. Certes, elle enrichit financièrement, de jeunes entrepreneurs et les gros acteurs du marché, et intellectuellement, certains d’entre nous qui trouvent un nouveau souffle dans l’exploration d’univers tels que celui des datas et de la conceptualisation. Mais la majorité de notre écosystème n’a pas encore donné de sens à cette disruption.

Du programmatic à l’adressable TV, de l’automatisation des process au machine learning, c’est à chacun de nous qu’il appartient de faire sens face à ces évolutions inéluctables. En quoi le gain de productivité dans nos procédures peut libérer du temps pour le bien-être au travail, à la maison ? Comment les revenus générés par la publicité ciblée peuvent profiter à la création de contenus, à la culture, … ? En quoi les nouveaux savoirs et compétences acquises sur ces terra incognita peuvent contribuer à la formation des cerveaux de demain ?

La révolution numérique ne peut être une fin en soi. Dans un monde publicitaire clos, seul le désir humain dans son infinitude peut nous mener au-delà d’un avenir prétendument morose.