Métro, boulot dodo, non !

Luc de Tillesse

Il faut avoir visité la villa Cavrois de Mallet Stevens à Croix—ce que j’ai fait récemment—pour se rendre compte de toute l’audace, de la clairvoyance et du mépris de la routine qu’il fallait avoir pour entreprendre ce type d’architecture. Bien sûr, il y avait eu Horta et les architectes viennois, il y avait aussi eu Frank Lloyd Right aux Etats-Unis, mais cela rendait la tâche de Mallet Stevens d’autant plus difficile.

Nous sommes tous convaincus qu’il faut mépriser la routine, qui est dangereuse, parce que nous nous habituons à des situations parfois horribles : l’indifférence que nous avons envers les SDF qui se fondent dans notre paysage quotidien, que nous essayons d’éviter en changeant de trottoir ou que nous n’osons pas regarder dans les yeux, en est un bon exemple. Qui pense encore à nos amis grecs et leur crise qui n’en finit pas?

La sortie de la routine avec le Brexit nous a fait peur, mais elle est déjà presque oubliée et remplacé par l’arrivée de Trump, qui nous fait encore plus peur, mais que nous finirons aussi par oublier, pour autant que nous retombions dans la routine à laquelle nous a habitué l’Union Européenne. J’avais pensé que le Brexit aurait fait réfléchir nos gouvernants à ce qui n’allait pas, et ce qu’il fallait changer dans la conduite de l’Union. Mais non, c’est tellement plus simple de se retourner et de continuer à raconter des banalités. Rien ne se passe bien, à part la fabrication de petits règlements qui sont aussitôt remplacés par d’autres. Aucun Mallet Stevens, aucune grande idée, si ce n’est de se réfugier chez Goldman Sachs, un fois terminé le boulot qu’on n’a d’ailleurs pas fait.

Mais, restons optimistes. En prestidigitation, une routine désigne un enchaînement de passes accompagnés d’un boniment qui constitue ce que le profane appelle un tour de magie, qui lui, rompt certainement la routine. Notre métier est-il enfermé par des notions de boniment afin d’attirer nos clients ? Si le boniment est basé sur le mépris de la routine, alors, la communication en sortirait victorieuse.
Souvent la période de fin d’année est propice à des créations un peu magiques qui sortent de la routine ou l’humain retrouve toute sa dignité.

Si le mépris de la routine peut-être contagieux alors, évitons d’être vacciné.