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Tous les départements marketing du pays s’agitent. Tout le monde attend impatiemment le STIMA Marketing Congress du mois de décembre. Qu’allons-nous y entendre ? Quels discours ne faudra-t-il pas rater ? Et que retiendra-t-on ? PUB vous dévoile l’envers du décor. En guise de préparation, voici quelques interviews menées auprès des orateurs-clés qui prendront la parole pour STIMA.

« Les clics ne veulent rien dire. »

Pour commencer, PUB s’est envolé (virtuellement) pour Chicago. Nous y rencontrons Gian M. Fulgoni, qui a grandi au Royaume-Uni où il a étudié la physique et le marketing. Il était, entre 1981 et 1998, CEO de IRI, fournisseur mondial de lecteurs de code-barres, et plus grande agence américaine d’études de marché. Il est nommé « Illinois Entrepreneur of the Year » en 1991 et en 2004. À ce jour, il est la seule personne à avoir reçu cette distinction à deux reprises. Il est co-fondateur et président d’honneur de comScore. Pendant le « Marketing Congress », il parlera de la multiplateforme construite par comScore et de ce que ses collègues et lui en ont appris. Il est évident que les données multiplateformes ont un effet bénéfique sur les tarifs publicitaires.

Gian M. Fulgoni

Gian M. Fulgoni


Il n’y a pas de jeu à somme nulle, affirme-t-il. How come, Mister Fulgoni?
Gian M. Fulgoni : « Plus il y a d’appareils, plus il y a de médias. Selon nous, on ne peut pas parler – ou très peu – de cannibalisme. Cette constatation n’a par ailleurs rien de nouveau dans le monde numérique. Avec l’avènement des tablettes et des smartphones, on pensait que cela cannibaliserait la communication par desktops. C’est uniquement vrai pour les petites niches, mais de façon générale, dans le nombre total de minutes et d’heures, ce n’est pas le cas. Les tablettes et les smartphones ne suppriment pas de temps. C’est une bonne nouvelle pour les annonceurs, car cela signifie qu’ils ont encore plus de chances d’atteindre des clients potentiels. Pour cela, il faut savoir qui est actif sur quel appareil et à quel moment. C’est là qu’interviennent les données de multiplateforme. »
Il y a la communication par tablettes, smartphones et ordinateurs, mais il y a aussi la télévision…
Gian M. Fulgoni : « Le Over The Top, c’est-à-dire lorsque l’on regarde la télévision par le biais d’autres appareils, va très certainement augmenter. C’est en train de devenir extrêmement populaire aux États-Unis. Il faudra ensuite se demander quelle quantité de contenu peut être streamée et quelle est la capacité des câbles. C’est un grand problème aux États-Unis, ainsi que dans d’autres pays où le câble est important dans la communication numérique, comme en Belgique. »
Chez nous, le débat porte surtout sur ceux qui regardent la télévision sur d’autres appareils : ce sont surtout les jeunes.
Gian M. Fulgoni : « Les jeunes passent énormément de temps sur leurs appareils numériques mobiles. Nos conclusions sont formelles : pour atteindre les millenials, il faut aussi passer au numérique. Cela signifie que les média-planneurs doivent trouver le juste équilibre entre la télévision pour le groupe cible plus âgé et le numérique pour les jeunes. »
Il y a ensuite la question de savoir comment approcher les jeunes de façon numérique, n’est-ce pas ?
Gian M. Fulgoni : « Le mot-clé c’est ‘talk’ : il faut parler avec le public cible. En tant qu’annonceur, vous devez vous demander ce qui rend une publicité attrayante et quelles publicités numériques utiliser. Le targeting – soit s’adresser au public visé de façon très ciblée – est extrêmement important. Le monde change incroyablement vite, et en tant qu’annonceur, vous devez suivre le rythme. Il faut ensuite mesurer ce qui a été atteint. Je dois d’ailleurs vous dire une chose : les clics, cela ne veut rien dire. Nous le savons, les gens du marketing le savent, mais ils le font quand même parce que c’est rapide et pas cher. Mais ça ne sert à rien. En fait, ils ne savent pas quels instruments utiliser. C’est une opportunité pour les agences, elles doivent être attentives à cela et œuvrer pour une meilleure mesure. C’est quelque chose qui met du temps à être assimilé par tous les échelons des entreprises. En 2009, il était déjà évident que les clics n’étaient pas la meilleure façon de mesurer les effets d’une action. »
Vous avez mentionné les millenials. Faut-il remplir les départements marketing de millenials puisqu’ils connaissent leur génération ?
Gian M. Fulgoni : « Prudence. Les jeunes n’ont pas forcément appris ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Le but reste que les gens achètent vos produits ou services, et ça, c’était déjà le cas avant l’arrivée du numérique. On entend souvent dire que ‘tout a changé’, mais ce n’est bien évidemment pas vrai. Certains surestiment le numérique. S’il est vrai que jusqu’ici c’est la meilleure façon d’atteindre certains publics, cela ne veut pas dire que tout est au point. Il reste encore des questions délicates. Le cookie targeting est en vogue en ce moment, mais il est tout sauf parfait. Et les adblockers restent un grand défi. La prudence est donc de mise. La communication numérique marche mieux que la télévision pour le targeting, pour faire des publicités ciblées, mais elle a ses propres problèmes. »
Les jeunes professionnels du marketing sont-ils suffisamment formés ?
Gian M. Fulgoni : « Ça pourrait être mieux. L’un des problèmes, c’est que le monde académique peine à garder le rythme. Je suis encore actif dans les universités où j’ai moi-même étudié. On y étudie le marketing numérique, mais la réalité du terrain change tellement vite que c’est un défi pour les universités que de suivre. »

« ‘Connaître’, c’est n’est pas la même chose ‘qu’aimer’ »

Pour notre deuxième interview, nous partons (toujours virtuellement, le métier de journaliste n’est plus ce qu’il était…) en Australie. Jenni Romaniuk est research professor à la University of South Australia Business School’s School of Marketing – où elle avait étudié l’économie et le marketing – et associate director du Ehrenberg-Bass Institute for Marketing Science. Son travail s’articule autour de la mesure de la santé du marché, des marchés émergents, de la fidélisation des clients, de la publicité par le bouche-à-oreille et la qualité des marques. Elle dirige des projets dans toute l’Asie, ainsi qu’en Amérique du nord et du sud. En ce moment, elle co-écrit How brands grow – part 2, avec Byron Sharp. « Nous savons maintenant comment fonctionne le marketing et comment les marques peuvent grandir, » dit-elle. « Il est temps de passer à l’action sur base de ce que nous savons et d’examiner tout ce que nous faisons à la lumière de nos connaissances. »

Jenni Romaniuk

Jenni Romaniuk


Approche-t-on les consommateurs de la mauvaise façon ?
Jenni Romaniuk : « Ceux qui sont convaincus qu’attirer de nouveaux clients – c’est-à-dire, la pénétration – est plus important pour la croissance que la fidélisation, ne comprennent pas tout à fait ce que cela implique pour les activités de marketing de façon plus générale, tout comme la maîtrise du lancement de nouvelles marques. Il est temps de revoir cela, car sans un système solide, une mauvaise tactique peut sacrifier tous les bénéfices, même si la stratégie est bonne. »
Vous êtes co-auteur de la deuxième partie du livre de Bryon Sharp, How Brands Grow. Qu’oublient souvent les marques lorsqu’elles veulent grandir 
Jenni Romaniuk : « Les marques oublient que les consommateurs ont une vie et que ce qui peut sembler terriblement excitant dans le monde du marketing passe parfois inaperçu auprès des consommateurs. Je pense par exemple à l’énergie et l’effervescence des départements marketing lors du lancement d’une nouvelle marque. Cela contraste avec la réalité où, après le lancement de nouvelles marques, la plupart des consommateurs continuent à vivre (et acheter) comme avant le lancement. »
Peut-on vraiment mesurer la qualité d’une marque ? Connaître est-il la même chose qu’aimer ?
Jenni Romaniuk : « Oui, on peut mesurer la qualité d’une marque en termes de disponibilité mentale (on y pense plus facilement) et de disponibilité physique (facile à trouver et à acheter). C’est le plus important car ces deux aspects comprennent suffisamment d’éléments pour que quelqu’un qui les manie bien ne doive plus consacrer de temps – ou de moyens – à des aspects moins importants, comme le fait que les gens aiment la marque ou non. ‘Connaître’, ce n’est pas la même chose que ‘bien aimer’, une disponibilité mentale, ce n’est pas la même chose qu’une connaissance. La disponibilité mentale, c’est la taille et l’état récent des structures cérébrales utiles dont disposent les acheteurs. »
Dans ce monde en constante évolution, sur quoi le marketing doit-il se concentrer, selon vous ?
Jenni Romaniuk : « Avant toute chose, le marketing doit avoir en tête une image globale de la stratégie et s’assurer que la tactique est en accord avec la stratégie, afin de pouvoir la réaliser. Si une nouveauté apparaît – et dans ce monde en évolution rapide et mené par la technologie, il y a toujours bien un ‘next big thing’ qui fait son apparition – il faut pouvoir la tester immédiatement par rapport à la stratégie. »
Y a-t-il quelque chose que les marketing managers oublient parfois de faire ? En d’autres termes : où font-ils fausse route ?
Jenni Romaniuk : « Parfois ils quittent la bonne voie car ils se laissent tenter par une nouveauté qui semble brillante, étincelante et qui leur promet de révolutionner la façon dont on fait du marketing. Or, de telles promesses ne sont jamais tenues… »

« L’engagement n’est pas le fruit du hasard, mais l’œuvre d’engineering. »

Après l’Australie, nous revoilà aux États-Unis, où Nir Eyal écrit, conseille et donne cours, cours lors desquels la psychologie, la technologie et l’économie se rencontrent. Il a fondé deux entreprises technologiques (qu’il a ensuite vendues) et enseigne ‘Using Neuroscience to Influence Human Behavior’ à la Stanford Graduate School of Business depuis 2003. Il tient un blog (NirAndFar.com) et écrit régulièrement pour des publications telles que TechCrunch, Inc, The Harvard Business Review et Psychology Today. Il a également rassemblé de nombreuses idées dans un livre, Hooked: How to Build Habit-Forming Products. Il est intrigué par les raisons qui expliquent le succès ou l’échec des produits. « Mon livre décrit la psychologie cachée derrière la façon dont nous avons l’habitude d’utiliser un produit, » explique-t-il. « Le monde des affaires peut profiter de ces perspectives pour faire revenir leurs clients sans devoir investir dans des publicités coûteuses ou inonder leurs clients de messages. La valeur économique des entreprises est de plus en plus liée à leur capacité de façonner les habitudes de leurs consommateurs. »

Nir Eyal

Nir Eyal


Qu’est-ce qui vous attire dans la façon dont les entreprises abordent leurs clients ?
Nir Eyal : « Dans la dernière entreprise que j’ai dirigée, j’ai travaillé sur l’intersection entre le gaming et la publicité, et j’ai vu quelles tactiques étaient utilisées pour changer le comportement du consommateur. J’ai constaté que de nombreuses personnes dans l’industrie ne savent pas comment certaines choses fonctionnent et quels principes psychologiques guident les comportements. Ils savaient juste que cela fonctionnait. En tant qu’entrepreneur, je me suis souvent arraché les cheveux en essayant de comprendre pourquoi les gens n’établissaient pas de liens avec les produits que nous fabriquions. De nombreux designers rencontrent la même frustration. Certains produits se vendent comme des petits pains, alors que d’autres font un flop sans que nous puissions expliquer pourquoi. »
Vous avez écrit un livre sur le sujet…
Nir Eyal : « Après avoir vendu ma boîte, j’ai décidé d’en apprendre plus sur le comportement des consommateurs avant de lancer une nouvelle entreprise. Je voulais savoir comment certaines expériences formaient des habitudes et c’est devenu la question centrale de mon livre : comment les produits créent-ils des habitudes ? Comment certaines entreprises parviennent-elles à faire revenir leurs clients à chaque fois sans débourser pour des publicités coûteuses ou des actions marketing qui s’apparentent à du spamming ? Pendant plusieurs années, je me suis plongé dans des textes sur la psychologie du consommateur, dans des livres sur le comportement économique et des enquêtes sur l’interaction avec les ordinateurs. Mais je n’ai pas trouvé d’instrument pratique pour construire un engagement répété. C’est pourquoi j’ai décidé d’écrire moi-même le livre que je ne parvenais pas à trouver. Je suis également d’avis que maintenant que les interfaces des desktops ont migré vers les laptops et ensuite vers les appareils mobiles et même les wearables, les habitudes ont pris un rôle encore plus important. »
Qu’est-ce qui rend certains produits ‘engaging’ et d’autres non ?
Nir Eyal : « Dans mon livre, je décris les ‘hooks’, les ‘crochets’, comme expériences où les problèmes des consommateurs sont résolus par une entreprise à une fréquence telle que cela devient une habitude. Les hooks sont des produits de tous genres que nous utilisons sans en prendre vraiment conscience. Au fur et à mesure, les consommateurs font des associations qui tout à coup engendrent de l’engagement, c’est-à-dire, des habitudes. Dans Hooked, je décris les quatre phases du processus et j’expose des détails sur la façon dont les produits utilisent les hooks pour créer des associations fortes. »
La psychologie joue-t-elle un rôle important ? Voire même le seul rôle ?
Nir Eyal : « L’engagement du client n’est qu’une partie de ce qui est nécessaire pour réussir dans le monde des affaires, ce n’est donc pas la seule chose qui compte. La croissance et le fait d’engendrer du profit sont tout aussi essentiels dans la réussite d’un produit. Chacun de ces trois aspects est important, mais pas assez pour être suffisant à lui seul. Le user engagement, et donc la compréhension de la psychologie du consommateur, est un facteur critique. »
Comment peut-on mesurer l’engagement du consommateur ? Sur seule base des clics et de la vente ?
Nir Eyal : « Je conseillerais d’abord de déterminer à quoi ressemble un engaged user, c’est-à-dire, de déterminer à quelle fréquence un consommateur est engagé avec l’un de vos produits ou services sur une période donnée. Dès que vous savez ce qu’est un engaged user, vous pouvez calculer quel pourcentage de votre public cible remplit les critères. Ensuite, vous pouvez changer certaines caractéristiques de votre produit et voir quel est l’impact sur le pourcentage d’engaged users. Si vous faites ça bien – en suivant les étapes décrites dans mon livre – ce pourcentage devrait augmenter. »
Sur quoi les managers marketing doivent-ils se concentrer dans ce monde qui change si rapidement ?
Nir Eyal : « Je suis de l’avis de Paul Graham qui dit que les entreprises qui réussissent font des choses que les gens veulent. Cela semble simpliste, jusqu’à ce que vous compreniez que les gens ne disent pas ce qu’ils veulent. Il faut donc faire bien plus que demander aux gens ce qu’ils veulent ; il faut les comprendre mieux encore qu’ils ne se comprennent eux-mêmes. Et pour ce faire, nous devons comprendre les notions de la psychologie du consommateur. »
Où les marketing managers font-ils complètement fausse route ?
Nir Eyal : « Je pense que trop de managers marketing et produits ne comprennent pas les motivations profondes et les besoins qui guident le comportement du consommateur. Ils se concentrent sur des détails du produit et vantent les caractéristiques techniques du produit sans se demander si leur produit pourrait devenir une habitude ou non. L’engagement du consommateur n’est pas le fruit du hasard, c’est l’œuvre d’engineering. »
 
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Marketing Congress

Le congrès annuel de STIMA – STImulating MArketing – est sans aucun doute the place to be pour tous les professionnels du marketing. Que vous soyez vissé sur votre siège de l’intro à la conclusion de l’événement, ou que vous préfèreriez sélectionner quelques-unes (des nombreuses) présentations prévues, be there and become a king of marketing. Le Marketing Congress 2015 aura lieu les 4 et 5 décembre au ICG, à Gand. Retrouvez toutes les infos pratiques sur le site www.stimacongress.be.