Quel destin pour la presse dans les petits marchés ?

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news-1074604_1920Le 22 mars dernier s'est tenu à l'UCL un colloque international organisé par l'ORM ( Observatoire de Recherche sur les Médias et le journalisme) sur le thème : «Presse, Transition Numérique et Petits Marchés.» Cette journée d'étude, consacrée à la problématique média des petits marchés, s'est vue amputée de son programme initial pour cause d'attentats... Les différents orateurs ont du synthétiser leurs interventions pour répondre aux normes de sécurité imposées à l'université. Nous vous proposons ci-dessous un compte-rendu succinct de ce colloque qui a rassemblé des intervenants de Suisse, Écosse, Danemark, Québec...

La problématique des petits marchés concerne naturellement la Belgique avec ses trois communautés, mais bien d'autres contrées également. On observe partout une même tendance à l'érosion de la consommation de la presse traditionnelle et à la baisse des revenus publicitaires. Cette réalité est durement ressentie sur nos petits marchés, où les coûts fixes pèsent lourd dans la balance. La problématique de la gratuité des contenus est vécue de manière différente en fonction des latitudes. Il en va de même au niveau de la concurrence entre médias. Ainsi, au Portugal, comme l'a souligné Paulo Faustino, professeur à l'Université de Porto, "la télévision s'accapare 75% des revenus publicitaires !" Une réalité qui n'est pas celle de l’Écosse, où la presse a toutefois perdu en moyenne la moitié de sa diffusion sur les 10 dernières années. Et Marina Dekavalla, de l'Université de Stirling, de citer Atholl Duncan, ancien rédacteur en chef de BBC Scotland, « Peut-être qu'on essaye de résoudre des problèmes numériques avec une logique analogique. On a sans doute besoin d'un état d'esprit différent ! » Tous les acteurs sont certes dans des situations de concurrence inter médias, mais ils sont aussi confrontés à d’autres offres sur le terrain des loisirs. Ceci implique de relever de nouveaux challenges en termes de création et de positionnement de marques.

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Les expériences menées hors de nos frontières sont rarement duplicables, même si elles peuvent s'avérer inspirantes. En Suisse, qui a une population de 8 millions d'habitants pour quatre langues, on observe que le groupe Ringier, la SSR et Swisscom se sont regroupés afin de commercialiser leurs médias sur une nouvelle plateforme publicitaire commune. «Cet accord, qui a été annoncé en aout 2015, et qui a reçu le feu vert des autorités début mars, a pour objectif de contrer des acteurs internationaux comme Google et Facebook, » souligne Dominique Bourgeois de l'Université de Fribourg. Au Canada, la Province de Québec connaît un « isolement culturel qui fait que les entreprises sont protégées d'influences étrangères. Mais les moyens en développements numériques sont donc plus faibles que sur d'autres marchés plus larges,» explique Renaud Carbasse de l'Université de Laval. Et ce dernier d’égratigner un nouveau modèle de presse, que les analystes médias des quatre coins de la planète ont salué : La Presse. Ce quotidien de Montréal a abandonné le papier – à l'exception de l'édition du week-end – en janvier dernier. Son application La Presse+ connaît un véritable succès : «Elle a été téléchargée plus de 500.000 fois, enregistre près de 250.000 lectures quotidiennes, avec un temps de lecture de 40 minutes, » précise notre interlocuteur. Qui ajoute : «Ce passage au tout digital a nécessité deux ans de développement et 40 millions de dollars investis. Son propriétaire le groupe Power Corporation, actif dans le domaine de la finance, perdrait, selon certaines sources, 1,9 millions de dollars par semaine avec La Presse.» Basé sur un modèle économique d'informations gratuites, financé par la pub, le titre suscite intérêt et curiosité dans les sphères médiatiques.
Pour nombre d'acteurs média, la question de savoir si la production d'informations n'est-elle pas en passe de devenir marginale dans l'activité des groupes propriétaires, est posée. Pour les plus chanceux, leurs revenus ne proviennent plus directement de leurs activités premières: la production d'information. Que l'on soit à Porto, à Bruxelles, à Copenhague ou à Fribourg, la question du nouveau modèle économique qui sauvera la presse, reste ouverte...

Note : L'ORM devrait proposer à termes les exposés des différents intervenants sur son site.