Résultats du baromètre des pharmacies de la VUB

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Les pharmaciens tiennent bon en cette période de crise. Après le pic observé au cours des semaines écoulées, la fréquentation des officines reste élevée mais tend à se normaliser. La pression sur les pharmaciens est toutefois particulièrement marquée sous l’effet du nombre accru de visites, du doublement des contacts téléphoniques qui s’y ajoutent, de l’absence d’un certain nombre de collègues et de l’impact physique et psychologique de la pandémie. S’ajoute à cela que, baisse des consultations en médecine générale aidant, la fonction soignante des pharmaciens s’est fortement élargie.

C’est ce qu’il ressort du dernier sondage réalisé entre le 30 mars et le 3 avril dans le cadre du baromètre de la VUB, qui évalue deux fois par semaine l’impact du Covid-19 sur les officines belges. Il s’agit d’une initiative du Pr Eline Tommelein de la faculté de Médecine et de Pharmacie de la Vrije Universiteit Brussel, qui suit l’évolution des événements depuis le 15 mars. Le dernier sondage en date a évalué la situation dans 637 officines totalisant un peu plus de 2000 pharmaciens. Les résultats sont partagés avec Sciensano et avec l’institut flamand pour les soins de première ligne (VIVEL).

Les pharmaciens belges se sont rapidement adaptés de manière à pouvoir aider les patients en toute sécurité et veiller à ce qu’ils continuent à bénéficier des conseils et des médicaments dont ils ont besoin. En dépit de l’absence d’une partie du personnel dans un certain nombre d’officines, à quelques rares exceptions près, la quasi-totalité d’entre elles restent ouvertes.

La pression a toutefois fortement augmenté au cours de cette période, puisque ceux qui sont encore au travail sont amenés à reprendre les tâches des collègues confinés à leur domicile, sans compter les nombreuses obligations supplémentaires (désinfection fréquente, appels téléphoniques…). Autre constat frappant : d’après les pharmaciens interrogés, deux tiers des visites à l’officine sont liées au coronavirus… et 40 % ne sont pas essentielles.

« Après une nette augmentation de la fréquentation des officines au cours des dernières semaines, nous observons à présent un retour à la normale voire une légère baisse. Le nombre de contacts téléphoniques est toutefois sensiblement accru : dans la majorité des officines, il semble avoir plus que doublé pour atteindre une moyenne de près de 30 appels par jour », commente le Pr Tommelein de la Vrije Universiteit Brussel.

Le corps et l’esprit sous pression

Le Pr Tommelein observe encore que la santé mentale des pharmaciens mérite une attention toute particulière. Un pharmacien sur 10 déclare être fortement sous pression d’un point de vue aussi bien physique que psychologique ; ils sont également nombreux à se sentir plus anxieux dans l’exercice de leur profession.

« Au travers de ce monitoring, nous nous efforçons d’apporter un soutien aux pharmaciens qui disent rencontrer des difficultés. Parfois, nous pouvons par exemple les aider à résoudre un problème pratique ou simplement les soutenir grâce à un contact par téléphone. En tout état de cause, nous devons vraiment surveiller de près la santé physique et psychologique des pharmaciens », souligne le Pr Tommelein.

Une pénurie aiguë de masques

« La manière dont les pharmaciens ont mis très rapidement en place les mesures d’hygiène nécessaires est tout à fait admirable. » L’étude indique que, après deux semaines, les dispositions d’hygiène requises ont été intégralement implémentées dans la quasi-totalité des officines. « Et c’est avant tout grâce aux pharmaciens eux-mêmes, qui ont pris des mesures de façon proactive bien avant la diffusion des directives. »

La majorité des officines disposent ainsi d’écrans en plexiglas et demandent aux clients de respecter la distance sociale et de payer par carte. Les difficultés d’approvisionnement en alcool désinfectant commencent par ailleurs à diminuer, même si les stocks disponibles restent destinés aux soignants. « L’absence de masques dans 65 % des officines et l’absence de gants dans 40 % d’entre elles reste néanmoins problématique, même si les pharmaciens comprennent évidemment tout à fait que les moyens disponibles soient fournis en priorité aux prestataires amenés à soigner des patients COVID19. »

La fonction de soins des pharmaciens élargie

L’enquête révèle également que de nombreux patients reportent leur visite chez le médecin parce qu’ils la jugent trop risquée. « Même en temps normal, les pharmaciens voient passer une foule de problèmes sans gravité – troubles gastro-intestinaux, toux, maux de tête, etc. – qu’ils évaluent soigneusement afin de déterminer si une consultation médicale est nécessaire. Les collègues interrogés laissent toutefois entendre que ces contacts ont fortement augmenté et certains rapportent également que, dans plusieurs régions, les médecins ne sont pas en mesure de voir tous les patients chez eux ou au cabinet. Du coup, ces personnes s’adressent aux pharmaciens, ce qui élargit sensiblement leur fonction de soins », souligne le Pr Tommelein.

Le succès du pharmacien de référence

Un certain nombre de développements récents – dont notamment le concept du pharmacien de référence – portent aujourd’hui leurs fruits. « Les patients qui sont amenés à prendre de nombreux médicaments ont la possibilité de choisir un pharmacien de référence, qui leur fournit alors un schéma de médication actualisé. Cette initiative semble particulièrement intéressante lorsque les patients doivent être hospitalisés, car le schéma de médication est immédiatement utilisable par les prestataires hospitaliers. Les établissements de soins ont d’ailleurs récemment appelé les patients à l’apporter avec eux lorsqu’ils en ont un », conclut le Pr Tommelein.