Un business de baby-boomers

Articles traduits

Les générations sont souvent moins homogènes que nous ne le pensons. Elles ne vivent pas non plus en autarcie. Les générations plus âgées influencent les plus jeunes, et inversement. Quelles sont leurs différences et points communs ? Joeri Van den Bergh d’InSites Consulting nous présente quelques tendances et chiffres. - Erik Verdonck
insights
Joeri Van den Bergh a assis sa réputation grâce à son enquête sur les jeunes, mais il ne perd pas de vue les générations plus âgées pour autant. « C’est logique, car les baby-boomers sont les parents des millenials. Ils ont incidence importante dans la vie des jeunes, » affirme-t-il. En cette période de vieillissement de la population, les marketeurs ont souvent tendance à se concentrer sur les jeunes et les adultes actifs (18 - 50 ans). Mais peut-on appliquer impunément les mêmes recettes aux groupes cibles plus âgés ? La réponse se révèle très nuancée.
TK_Annonce_sept2012_267x202_FR.indd
Réflexions générationnelles
Qu’est-ce qu’une génération ? Un groupe d'individus élevés à la même période et de la même manière. Ils sont marqués par des questions essentielles telles que les guerres, les crises économiques, les périodes de haute conjoncture, ou des évènements majeurs comme les attaques du 11 septembre 2001 sur le World Trade Center à New York. Les évolutions technologiques et médiatiques laissent aussi des traces. Pensez notamment aux différences entre regarder une émission à la télévision et une vidéo YouTube sur votre tablette. Les valeurs sociales inculquées (ou non) à une génération dépendent par ailleurs de l'éducation, elle-même déterminée par divers facteurs, tels que le revenu des parents. Le concept d’influence mutuelle entre compagnons générationnels n’est pas neuf, mais les réseaux sociaux ont accéléré le processus et renforcé son impact. Il y a quelques années, lorsque vous vouliez appeler un ami, vous utilisiez un téléphone à pièces de monnaie. Aujourd’hui, vous partagez tous vos états d’âme par WhatsApp. La première génération à pouvoir écouter sa propre musique sur des transistors était celle des baby-boomers. Cela explique le succès du rock ’n’ roll. Aujourd’hui, leurs enfants utilisent un smartphone pour regarder des vidéos et écouter de la musique. Le monde devient de plus en plus mobile, tandis que les évènements locaux et individuels se transforment presque instantanément en faits internationaux.
wade-austin-ellis-713092-unsplash
Des jeunes silencieux
De nombreuses études qualifient les seniors, nés entre 1928 et 1935, de « génération silencieuse ». Ils ont grandi en temps de guerre. Ces personnes sont pragmatiques, économes et allergiques aux absurdités. Elles ont mis de l’argent de côté pour leurs enfants. Les hommes subvenaient aux besoins de leur famille, tandis que les femmes se consacraient au foyer. La préoccupation principale de ce groupe cible est la santé. Ils ne sont plus actifs professionnellement. Leurs moyens sont limités parce qu’ils ont surtout investi dans leurs enfants. Ces individus sont fidèles à certaines marques, mais font aussi très attention à leur porte-monnaie. Ils répondent à l’image stéréotypée de « papy et mamy », du moins aux yeux des jeunes marketeurs. « Il est toutefois incorrect de comparer les baby-boomers plus âgés avec la génération précédente, celle des seniors, » estime Joeri Van den Bergh. « Le plus grand groupe de baby-boommers (1946-1964) n’a pas l’air vieux, ne se comporte pas comme s’il était vieux, et ne se sent pas vieux. Il est composé de personnes actives, en bonne santé. » Elles ont connu les « golden sixties », dépensent volontiers de l’argent et vivent en adéquation avec leur époque. Elles sont actives en ligne, sur les réseaux sociaux, sur Facebook... Elles sont sensibles aux marques et s’adaptent aux changements technologiques, tels que l’évolution du transistor vers le smartphone. Les baby-boomers utilisent des applications pour rencontrer des gens, pour divorcer, pour voyager. La technologie leur offre davantage de liberté et de temps libre. Les lave-vaisselle, les machines à laver complètement automatisées et les séchoirs allègent leurs tâches ménagères. Ces baby-boomers sont beaucoup plus proches de leurs enfants que la génération précédente. Ils les ont élevés comme leurs égaux. Ils sont également très influencés par les millenials. « Ils se comportent comme s’ils étaient très jeunes, » explique Joeri Van den Bergh. « À New York, les baby-boomers déménagent à présent dans les quartiers plus branchés dès que les enfants ont quitté le nid. Ils recherchent un environnement plaisant et veulent mener une vie active, écouter des concerts et visiter des expositions, manger au restaurant... Cette tendance s’étend désormais à d’autres villes. »
Vous avez dit baby-boomers ?
Les baby-boomers peuvent être séparés en master boomers (1946-1955) et late boomers (1956-1964). Les plus âgés disposent de temps et d’argent. Leur pouvoir d’achat est deux fois et demie plus grand que celui de la génération silencieuse au même âge. Ils économisent moins. Ils sont aussi nettement plus progressistes, influencés par la révolution sexuelle, et militent pour les droits de la femme. Ils profitent de la vie et de l’instant présent. Ils veulent agir et voyager maintenant, tout en profitant d’un certain confort. Ils se servent aussi des nouvelles technologies au travail et dans leur vie privée, et utilisent par exemple l’e-commerce. Leurs exigences en matière de services (personnels) sont élevées. Pour répondre à leurs attentes, Albert Heijn mène pour le moment une expérience avec des caisses « calmes », où la caissière prend le temps de discuter et d’emballer les achats. Les baby-boomers plus jeunes travaillent encore, arrivent à la fin de leur carrière ou partent en prépension. Ils disposent, par conséquent, de moins de temps. Ce sous-groupe est moins optimiste que le précédent. Il a connu la crise du pétrole et la récession économique. « Les late bloomers sont plus critiques. Leur profil correspond davantage à celui de la génération suivante : la génération X, » estime Joeri Van den Bergh. Ils sont particulièrement actifs et compétents sur le plan numérique. Vous les rencontrerez à l’occasion d’évènements comme Rock Werchter, Tomorrowland ou Coachella, où ils viennent écouter « leur » musique. Ils ont les mêmes goûts que leurs enfants (les millenials). Toutefois, ce dernier constat vaut aussi pour les master boomers. Ils sont prêts à dépenser de l’argent à condition de bénéficier de suffisamment de services et de confort.
BPO_Abribus_2m2-1
Une question de cheveux gris
Certes, mais comment en tirer parti en tant que marketeur ? Nike a choisi comme égérie Madonna Buder, triathlonienne de 86 ans. Kinepolis diffuse de l’opéra et des comédies lors de séances spéciales et plus confortables, avec du champagne et sans bruits de pop corn dérangeants. Thomas Cook Danemark séduit grâce à sa campagne de voyage « Do it forever ». Dans le secteur de la mode et des cosmétiques, être âgé ne signifie plus être hors du coup. L’année dernière, Gucci a axé une campagne sur Vanessa Redgraves, 79 ans, tandis que Calvin Klein s’est tourné vers Lauren Hutton, 74 ans. Dans le film Youth, les premiers rôles sont tenus par Michael Caine et Harvey Keitel, tous deux septuagénaires. Les personnes âgées inspirent les jeunes. Les générations aux cheveux gris ont désormais la cote auprès de la jeunesse. Des ouvrages tels « Wat als we straks 100 worden? » (« Que se passera-t-il si nous devenons tous centenaires ? »), publié l’année dernière et écrit par le marketeur Dirk Schyvinck, changeront votre regard sur l’âge. L’intérêt pour le « marketing argenté » ne cesse, quant à lui, de grandir, comme nous vous l’expliquerons dans les pages suivantes de ce numéro de PUB.
 
Légendes photos
Joeri Van den Bergh (InSites Consulting) : « Le plus grand groupe de baby-boommers (1946-1964) n’a pas l’air vieux, ne se comporte pas comme s’il était vieux, et ne se sent pas vieux. Il est composé de personnes actives, en bonne santé. Celles-ci ont connu les « golden sixties », dépensent volontiers de l’argent et vivent en adéquation avec leur époque. »
Différences générationnelles (Source : « How cool brands stay hot »)
Bandeau
« Le pouvoir d’achat des baby-boomers plus âgés est deux fois et demie plus élevé que celui de la génération précédente au même âge. » - Joeri Van den Bergh