Voici venu le temps des annonceurs

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Jan Callebaut (59 ans) n'a plus rien à prouver. Et même s'il est moins connu de la jeune génération de créateurs de marques et publicitaires, il fait tout pour stimuler les jeunes dans leur discipline et pour tirer constamment des enseignements de leurs expériences. Jan Callebaut est un chercheur passionné qui, dans les années quatre-vingts, a été le premier, avec son partenaire de l'époque, Hendrik Hendrickx, à déplacer l'accent du produit vers le consommateur en marketing.

We zitten in de decade van de adverteerder - Jan Callebaut 1 - pub4-2014
NONCHALANCE

Dans quelle mesure l'accent est-il toujours trop mis sur la marque plutôt que sur le consommateur?
C'est une lutte permanente. Cela équivaut à la différence entre l'ingénieur et le psychologue et on le voit dans les effectifs des entreprises commerciales. La manière dont les comités de direction sont composés fluctue entre le temps des ingénieurs et le temps où les experts des consommateurs ou les partisans des sciences alpha et bêta exercent leur influence. C'est une fluctuation constante.

Après tout ce qui est déjà paru à ce sujet, on penserait tout de même que les chefs d'entreprise ou les comités de direction devraient le savoir.
Cela dépend de votre sensibilité. On le voit aussi chez des producteurs de big data comme Google entre autres. Ils se sont entièrement concentrés sur les faits et les produits. Et que constate-t-on maintenant? Qu'ils glissent peu à peu vers le comportement des consommateurs et qu'ils suivent les schémas irrationnels. C'est une évolution très logique. En fin de compte, le produit et le consommateur sont tous deux des éléments essentiels de l'ensemble, les deux faces de la même pièce.

DÉSIR DE CONNEXIONS

Avec toutes les nouvelles technologies, le métier de la publicité et de la communication ainsi que celui de la recherche ont subi des changements radicaux. Mais l'être humain a-t-il changé? Quel impact ces changements ont-ils sur l'être humain?
Cela dépend de ce qu'on entend par changements. L'être humain fait-il des choses différentes? Oui, absolument. Mais désire-t-il des choses différentes? Évidemment pas. Les besoins basiques sont restés les mêmes. Quel est le moteur de l'être humain? La première motivation est de rester en vie et de développer cette vie au maximum. Et comment le faire? En interagissant avec l'environnement. Pour ce faire, on cherche en premier lieu l'amour de ses parents et, ensuite, celui des amis, d'un amoureux ou d'une partenaire. Mais cela motive aussi la quête de connaissance. Tout est mu par le désir d'établir une connexion de l'intérieur vers le monde extérieur. Ces désirs existent toujours. Mais la manière de les satisfaire est naturellement influencée par les évolutions technologiques.

Avez-vous besoin de cette connaissance en tant que marketeur?
Le métier de marketeur a évolué au point qu'il comporte aussi de nombreuses fonctions techniques. Et pour certaines de ces fonctions, on n'en a pas besoin. Mais pour tous ceux qui occupent un poste stratégique en marketing ou qui font face à une expansion dans un environnement commercial, ce sont naturellement des connaissances essentielles. Il faut connaître le moteur des gens et comment ils s'accordent en fin de compte une existence utile.

D'après vous, quelles sont les caractéristiques de base d'un bon marketeur?
S'intéresser aux gens et respecter le produit pour lequel vous travaillez. Dans cet ordre. Un bon marketeur reste focalisé sur ces deux aspects, il se connaît, il connaît ses forces et ses faiblesses et il les compense par un soutien si possible. Mais toujours dans le but certain de favoriser cette relation.

TOUT LE MONDE EST MARKETEUR

Avez-vous l'impression que cette connaissance a augmenté? Ou recule-t-elle?
Le métier de marketeur n'est pas si vieux. Le marketing a en fin de compte été une intervention ou une espèce de compétence ou de dimension complémentaire qui a surtout été ajoutée dans les entreprises commerciales pour accroître l'attention consacrée au consommateur, à l'utilisateur ou au client. Pourquoi? Parce que les ingénieurs qui s'occupaient du produit n'avaient pas le temps ni la sensibilité nécessaires pour s'y consacrer. C'était une espèce de mouvement de rattrapage. Et qu'en avons-nous fait depuis la fin des années nonante? Tout le monde est devenu marketeur. Donc, autrement dit, cette dimension, cette sensibilité visant à consacrer de l'attention au client est devenue un élément de toute l'entreprise. Cette dimension s'est donc développée et répandue. La question est: qu'ajoute le titre de 'marketeur' à ce processus? Cette fonction est peut-être devenue superflue. Je pense que le métier doit faire une introspection et se demander à partir de quand les marketeurs méritent le respect.

Un chef d'entreprise doit-il toujours avoir un rôle ou une vision marketing?
Évidemment! Un bon chef d'entreprise doit être expert en finances, connaître parfaitement ses processus de production, mais tout autant son marché et les mécanismes de ce marché. Il doit donc connaître une série d'aspects du marketing. Pour terminer, je ne pense pas qu'un marketeur soit nécessaire dans une entreprise, à condition que tous les autres soient en partie des marketeurs. Qu'ils connaissent l'aspect de la relation avec les clients et qu'ils l'intègrent dans leur job. S'ils le reconnaissent, il n'est peut-être plus nécessaire d'en faire une fonction réservée.

Quelle est pour vous la différence entre un marketeur et un annonceur?
La publicité recherche sciemment le contact avec vos clients potentiels alors que le marketing concerne la gestion de l'ensemble du flux relationnel entre l'entreprise et le marché. La publicité est donc un élément du marketing, mais ce ne sont pas des synonymes. Le métier d'annonceur est aujourd'hui de plus en plus complexe. C'est une tâche énorme de juger toute la base de contact renouvelée et de savoir comment l'utiliser à votre profit. En outre, vous devez maintenant aussi tenir compte de la valeur contextuelle de vos efforts, alors qu'avant, seul le nombre de contacts importait.

L'ÈRE DE L'ANNONCEUR

Cette fonction devient aussi nettement plus importante.
Oui, naturellement. Si les années quatre-vingts ont été la décennie du marketeur, les années jusqu'en 2020 seront sans conteste celles de l'annonceur qui doit apprendre de manière pointue tout ce qui se passe et la signification de tout cela.

Et le rôle de l'agence publicitaire dans tout cela?
La créativité est sacrée, en toutes circonstances. C'est toujours une activité de l'agence publicitaire. Cependant, nous avons dû nous réinventer, car on a de nouvelles façons de collaborer, aussi avec les collaborateurs. Certains sont très doués en Belgique, mais il faudra encore du temps pour y trouver un équilibre. Car, outre cette créativité, son support est important et celui-ci devient de plus en plus technologique. Il faudra encore un certain temps avant que tout ceci devienne un marché mature.

Photos: Luc Hilderson (Image4you)