Communiquer tout en restant politiquement correct

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Communiquer sans heurter certains publics ne semble aujourd’hui plus si simple. Certains se sentent offensés lorsqu’un politicien publie un tweet catégorique, tandis que d’autres sont au contraire agacés par des déclarations trop cadenassées. Dans le monde des affaires, il est aussi devenu opportun d’utiliser un langage politiquement correct. Prenez par exemple la réaction des sponsors des Diables Rouges suite à la proposition initiale d’une chanson par le rappeur Damso, jugée comme étant antiféministe, en tant qu’hymne pour la Coupe du Monde. C’est en fait devenu ce qu’on pourrait appeler un véritable phénomène social. La preuve encore récemment avec la désastreuse communication à propos du marché de Noël - ou d’hiver - de Bruges. Ce qu’est exactement une communication politiquement correcte occupe de nombreux experts en communication, encore plus, me semble-t-il, que le phénomène des « fakes news ».
Il n’existe pas vraiment de définition unique du « langage politiquement correct ». Puisque le terme se divise en deux parties, examinons d’abord ce qui est « politiquement correct ». Que nous dit Wikipédia à ce propos ? Le politiquement correct : « désigne, principalement pour la dénoncer, une attitude véhiculée par les politiques et les médias qui consiste à policer excessivement ou modifier des formulations parce qu'elles pourraient heurter certaines catégories de population, notamment en matière d'ethnies, de cultures, de religions, de sexes, d'infirmités, de classes sociales ou de préférences sexuelles ».
Cela nous semble être une définition assez laconique, et surtout critiquable. Le politiquement correct peut être défini beaucoup plus facilement. Une communication politiquement correcte désigne une communication véridique, factuelle, rassurante et cohérente. Que de grands mots. Elle doit être fidèle à la vérité car on ne peut pas tromper délibérément son public, et factuelle car il ne s’agit pas nécessairement d’une opinion. Il faut qu’elle soit aussi rassurante car on veut éviter de semer la panique, et cohérente car il faut s’assurer que vos propos ne puissent pas être mal compris. « Politiquement correct » correspond ainsi presque à « professionnel » ou « officiel ».
Chacun a bien évidemment droit à son opinion. Et c’est certainement le cas des politiciens, qui veulent l’exprimer à tout moment et avec détermination pour convertir les autres à leurs propres convictions. Cependant, les opinions peuvent diverger considérablement et sont régulièrement opposées. Êtes-vous pour ou contre Donald Trump ? Il ne semble pas y avoir de compromis possible sur la question. “You hate him or you love him”. Qu’est-ce qui est donc politiquement correct ou encore mieux, qui communique de faççon politiquement correcte ? Celui qui est pour, ou celui qui est contre ? Le politiquement correct polarise encore plus le débat.
Ce qui nous semble vrai, c’est que la communication autour du politiquement correct évolue avec la langue. Par exemple, le mot « discrimination » était auparavant interprété comme étant le fait de « séparer de distinguer deux ou plusieurs êtres ou choses à partir de certains critères ou caractères distinctifs. ». Actuellement, ce terme a une connotation beaucoup plus péjorative. En cas de sexisme, on parle même de « discrimination négative ». À l’époque, nous parlions d’une « femme de ménage », maintenant c’est une « technicienne de surface ». Un « handicapé » est devenu un « invalide », etc. Une langue est vivante et évolue au fil des années, avec l’air du temps. C’est précisément pour cette raison que le langage politiquement correct va suivre la même destinée, c’est inévitable.
Cela veut aussi dire que nous ne pourrons jamais clôturer totalement le débat du politiquement correct. Les experts en communication devront apprendre à vivre avec, idéalement de manière créative. Cela exige un exercice permanent de balance entre les termes, les mots et les tournures de phrases. Cela demande une grande souplesse et une capacité de s'adapter à un monde et à un environnement en continuelle mutation. N'est-ce pas là l'essence ou la valeur ajoutée du conseiller en communication ? Et si ça ne l'est pas, ça a le mérite de nous faire garder un esprit vif....
 

Kris Poté, president C², 5 novembre 2018.

 
KRIS POTE (1)
Plus d'infos sur le  Belgian Communication Summit du 27 november: https://www.csquare.be/nl/belgian-communication-summit-2018/