MDB 2016 une année digitalement sous estimée !

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Au baromètre des investissements, on observe une forte progression de la valeur média en Belgique en 2016 : en données constantes, on est tout près des 7%. Malheureusement, il y a un fort contraste entre un premier semestre dynamique et une autre moitié de l’année atone. Mais la pub télévisée a connu une année flamboyante.

Nous vous livrons ici l'analyse de Bernard Cools, Deputy General Manager chez Space
• En 2016, la vision « courante » et la version «euros constants » de l’évolution annuelle du marché ne sont pas contradictoires : +6% en courant, un peu de moins de 7% en constant.
• Inégale, 2016 le sera doublement : d’abord par la répartition de la croissance dans le temps. 78% de la progression annuelle a été réalisée au cours des 6 premiers mois, et ensuite par la répartition, très déséquilibrée entre les catégories de médias.
• Ainsi, 2016 sera une autre grande année pour la télévision, déjà première du classement, et qui gagne encore 2 points de parts de marché. Radio et presse quotidienne sont également à la fête, mais dans une proportion nettement moindre. Ailleurs, c’est plutôt la stagnation, voire un recul sévère.
• Le digital, pointé à seulement 5% du total (données constantes) est plus que jamais sous- estimé dans l’outil Nielsen. Les manques structurels liés à l’absence de couverture des acteurs internationaux du Web devraient toutefois disparaître graduellement à partir de cette année 2017.
• Médias, automobiles, tourisme, distribution physique et e-commerce, télécoms : tous ces secteurs contribuent à la croissance. On est par contre loin de la progression quasi généralisée des produits de grande consommation qu’on avait connue en 2015.
• La reprise qui s’annonçait à l’issue de l’année dernière semble s’estomper : la croissance importante connue en 2016 pourrait n’avoir aucune suite.

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Media Data Bank (MDB) est l’outil dit de « pige quantitative » de référence opéré depuis plusieurs années par Nielsen. En soi, il consiste en un suivi des plans médias des annonceurs belges. Son objectif de base est de fournir les calendriers d’action des marques et produits de ces annonceurs et d’en mettre à disposition si nécessaire les visuels, films, spots, etc. A partir des calendriers d’action, on peut également estimer les contacts réalisés sur n’importe quel segment de population présent dans les différentes études d’audience CIM. On peut également estimer la valeur de ces plans médias, en la dérivant des tarifs des supports qui les abritent, sans réduction aucune. La valeur d’un plan média telle que résultant des données MDB peut même être plus élevée que celle qui proviendrait d’une simple application des conditions générales de vente des supports concernés ! Il n’y a donc que peu de relation avec le prix réellement payé par l’annonceur. Encore plus en 2016 : certains médias (surtout dans l’audio-visuel flamand) ont décidé de supprimer dans leurs tarifs la traditionnelle commission d’agence de 15% qui vient en déduction des achats réalisés par les intermédiaires reconnus. Pour maintenir l’historicité, très importante dans ce genre d’outil, la « pige quantitative » a maintenu ces 15% pour tous les supports, qu’ils aient ou non abrogé la commission d’agence. Cela signifie que pour les médias concernés, la valeur « pige » est d’autant plus différente que cette dernière est basée uniformément sur un prix intégrant la commission d’agence alors que dans la pratique, dans certains cas, même le tarif de base est en diminution faciale de 15% par rapport à 2015. Moins que jamais donc, MDB ne constitue donc un indicateur comptable. D’un point de vue « marché », la source a un intérêt pour étudier l’utilisation des médias de manière agrégée (répartition entre eux, saisonnalité, etc) et observer les évolutions dans cette utilisation, le tout dans une situation aussi harmonisée que possible d’une année à l’autre.
La valeur cumulée en données courantes pour les 12 mois de 2016 dépasse les 4 milliards d’euros, avec une progression de 6.1%. Il faut néanmoins tenir compte de changements dans le périmètre des supports étudiés : lorsqu’on les aligne strictement (voir détails ci-après), la progression du marché média belge se monte à 8.1 %. Toutefois, pour refléter l’évolution en données constantes, il faut tenir compte de la variation des tarifs pratiqués entre 2016 et 2015 : ces prix ne sont pas tous à la hausse, on le verra, mais globalement, ils progressent de 1.2% et viennent donc en réduction. D’où en vue constante, une évolution de +6.9% : une année 2016 plutôt bonne vue comme cela !

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En détail, les corrections et nuances apportées :
- La catégorie « journaux » ne présente aucune différence notable entre la série de titres mesurée en 2016 et celle de l’année précédente. Compte tenu d’une inflation tarifaire estimée à +1.1% (format 1⁄2 p en tarif national), l’évolution en données constantes est ramenée à 5.8%.
- En magazines, la progression tarifaire 2016 était de 1.7% sur le format de référence (une page quadrichromie). Parallèlement, la comparaison à titres strictement identiques ramène la baisse du marché magazine à 2.6% (on note globalement 6 disparitions de titres ou groupes de titres et 6 nouveaux entrants en 2016, tous exclus de la comparaison). La combinaison des deux porte la différence entre les deux années à -4.3%.
On notera que notre catégorisation magazines comporte dès 2014 les suppléments de quotidiens (type Standard Magazine, Nina ou encore Victoire) que Nielsen n’a considérés comme magazines et englobés dans cette catégorie qu’à partir de 2015.
- Pour la presse locale gratuite, contrairement à l’année dernière, le périmètre de titres est resté inchangé. Mais la progression tarifaire estimée à 3% (formats les plus utilisés par titre, tarif national) contribue à creuser l’écart constaté en données courantes, et ce type de presse termine à -4%.
- En affichage aussi la différence de périmètre est importante à signaler : la disparition en octobre 2015 de la régie Think Media Outdoor (TMO) oblige à ne pas tenir compte dans la comparaison de cette régie. A liste de vendeurs constante, ce marché progresse de plus de 2% en 2016 par rapport à 2015. Mais l’application d’une correction pour l’inflation tarifaire, estimée à +3%, amène à un bilan légèrement négatif : -0.8%.
- Progression annuelle à deux chiffres pour le média télévision : +11%. D’une année à l’autre cependant, un certain nombre de chaînes se sont ajoutées (11 !) et une a disparu dans le courant de 2015 et est donc exclue de la comparaison. Compte tenu de cela, la progression du média « se limite » à 9.5%. Toutefois, l’évolution négative du prix de l’espace (-3% en 30′′) amène l’évolution en constant à pas moins de 12%. On verra plus loin que la télévision est de loin le média qui a le plus contribué à la croissance annuelle du marché.
- La radio signe également une forte progression en courant, à +8%, à peine modifiée par les petites différences (absence de Klara dans les données 2016, où apparaît un générique « autres RMB »). L’évolution négative des tarifs moyens 30′′ pris comme référence résulte une progression proche des 11%.
- Pour le cinéma, l’évolution fortement négative se fait à périmètre et données tarifaires inchangés : pour ce média « courant » égale « constant ».
Pour Internet, 142 sites participent à la comparaison « like for like » de 2016 à 2015, alors que l’ensemble de la base Nielsen de 2016 en comptait 214. A titres constants, l’évolution de l’Internet belge de l’univers MDB est de -8% par rapport à 2015. Heureusement, l’estimation des tarifs (suivant la méthode pratiquée dans le document UMA 1) montre une diminution de -4%, qui vient donc compenser. Au final, Internet ne régresse donc que de 4%, ce qui reste assez particulier, car le digital est clairement en vogue dans le monde « marketing communication ». On rappellera encore que la vision Nielsen du poids publicitaire d’Internet en Belgique est largement sous-estimée.

Ainsi revisitées, les données MDB-Nielsen nous enseignent que la croissance du marché média est très fortement tirée par la télévision et, dans une moindre mesure, par la radio (qui était dans une position différente en 2015) ainsi que la presse quotidienne.

Secteurs et annonceurs : qui gagne ? qui perd ?

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C’est l’agrégat culture tourisme loisirs et sports qui contribue le plus à la croissance annuelle du marché média belge : on verra plus loin que cette évolution est surtout due à la communication des médias et aux services touristiques (Trivago est à +103% !). On trouve l’automobile juste derrière, qui a contribué à une belle tenue des ventes de voitures neuves en 2016 2. Viennent ensuite l’équipement de la maison et du bureau et la distribution : aussi bien les points de vente physiques que la vente à distance permettent la croissance de cette catégorie. Les télécoms retrouvent une certaine vigueur et contribuent à hauteur de 8%, juste devant les produits de grande consommation, dont la croissance était plus soutenue en 2016.

Le top 50 des annonceurs, ci-dessous, demande quelques explications

- Le total « Proximus Group » reflète la nouvelle configuration et intègre donc ce que Nielsen regroupait auparavant (jusque dans le courant de 2015) sous le nom
« Belgacom », pour établir une comparaison correcte.
- En ce qui concerne Mobistar, devenu Orange, nous avons agrégé les anciennes dénominations France Telecom (active jusque début 2016) et Orange, de façon à permettre une comparaison correcte.
- Egalement pour Ahold et Delhaize, les deux entités ont été fusionnées, même dans leur historique récent.
- Avec Engie/Electrabel et GDF Suez, nous avons également agrégé les dénominations et leur valeur média dès 2014.
- Enfin, comme précédemment le holding virtuel « Communautés et Régions » maintenu par Nielsen a été redistribué entre les entités fédérées : Communauté Flamande,Communauté Française, Région Wallonne, Région de Bruxelles Capitale, etc, de façon à représenter correctement les niveaux de pouvoir effectifs.
Globalement, le top 5 des annonceurs connaît quelques changements : Procter & Gamble reste l’annonceur n°1 en Belgique, mais l’importateur du groupe VW d’Ieteren et le groupe Proximus gagnent chacun une place, repoussant Unilever en-dehors du podium. Pas de changement en revanche pour Reckitt Benckiser.
Contrairement à 2015, les annonceurs actifs dans la grande consommation affichent des mouvements divers : certains d’entre eux, comme P&G ou AB Inbev par exemple, accroissent fortement leur exposition. Sans compter la croissance explosive de Ferrero, déjà évoquée. Mais il y a le recul d’Unilever, celui de l’Oréal ou de Nestlé, entre autres exemples.
Côté telecoms, le changement de nom pour Orange et la reprise de Base pour Telenet alourdissent leur poids média, tandis que la hausse est plus modérée chez Proximus. En revanche, chez Nethys/Voo, le recul est sévère.
2016 a des allures de festival pour l’automobile : tous les grands annonceurs de ce secteur sont en hausse (voir plus haut) à l’exception de Mercedes et Ford.
Dans la distribution, Colruyt est en légère baisse, mais ses concurrents Ahold-Delhaize, Carrefour, Aldi ou Lidl ont par contre développé leur visibilité média en 2016, contribuant à une hausse importante dans cette catégorie.
Enfin, du côté des annonceurs financiers, il y a des extrêmes : forte croissance pour Belfius, mais sévère régression chez ING et BNP Paribas, et on a vu que l’ensemble du secteur était plutôt déprimé.

MDB 2016 ranking adv 4Internet à 5% du total média, c’est bientôt du passé !

 

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Nous l’avons déjà souligné : le périmètre de la pige Nielsen est très limité en matière de digital. Il ne contient notamment pas de données relatives aux grands acteurs internationaux comme Google ou Facebook. Comme on peut raisonnablement croire que l’investissement publicitaire y progresse, on devine facilement que Nielsen passe involontairement à côté d’une partie de la croissance réelle du marché. Normalement, 2016 devrait être la dernière année où Internet est aussi mal couvert : Nielsen a en effet prévu de changer dès cette année la méthode de recueil de l’information. L’ensemble du spectre online ne sera pas couvert en 2017, mais la couverture devrait s’améliorer sensiblement.
En attendant cette nécessaire extension, les estimations de Groupm pour la valeur nette du marché belge font état d’une part de 20% pour Internet dans le total média, avec un glissement progressif entre le « display » classique et d’autres formes de publicité digitale : le « search », l’achat de mots-clés, l’achat automatisé aux enchères (RTB, Real Time Bidding), la vidéo online et l’emailing. Le problème avec la situation actuelle des données Nielsen sur le sujet n’est pas d’estimer la valeur du marché média digital en Belgique: comme on le voit ci-dessous, il est possible de produire des données à nos yeux plutôt crédibles. Le problème est en fait qu’avec des données Nielsen incomplètes, il est difficile pour les annonceurs belges de connaître le détail des plans médias digitaux de leurs concurrents, ce qui est –nous l’avons signalé- la première utilité de l’outil MDB.

Et en 2017 ?

 

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Malheureusement l’évolution mensuelle observée au cours du second semestre 2016 n’est pas très positive. Si elle se prolonge, elle annonce une période de stabilité voire de légère régression. C’est globalement ce que Groupm prévoit : après une hausse de 6% en 2016, le marché média devrait régresser d’un peu moins d’1% en 2017. Et cela même si l’économie belge se porte bien : on vient de voir en effet que les courbes publicité et économie n’étaient pas très bien ajustées dans notre pays.