Digital touch

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Comme tous les métiers de la communication, l'événementiel aussi a subi la déferlante digitale. Web, réseaux sociaux et nouvelles technologies ont certainement apporté un nouveau souffle au secteur... Mais si le digital a amené avec lui son rythme effréné, il a également remis l'événement au niveau des gens.

« Ce que recherchent tous les marketeers aujourd'hui, c'est le brand engagement. Or, l'on se rend compte combien l'événement – l'expérience – compte pour faire connaître la marque auprès des consommateurs, mais surtout pour susciter leur engagement, » indique Olivier Trop, strategic director chez The Oval Office. « C'est l'avènement du digital et des réseaux sociaux qui est à la base de cette réflexion: désormais tout un chacun est média, dispose d'un porte-voix pour exprimer son opinion et peut devenir ambassadeur. » Il faut donc lui donner des raisons de parler de la marque et... le soigner aux petits oignons! « Toute expérience doit plus que jamais être 'likeable' et 'shareable', au sens où l'entendent les médias sociaux. » D'ailleurs, très rares sont encore les activations qui n'intègrent pas une facette digitale dans leur concept. Et ceci concerne aussi la communication avant et après ledit événement.

En amont d'abord, il importe bien entendu de faire connaitre l'événement. Les médias sociaux sont devenus incontournables à cette étape. Cela va de choses assez évidentes, comme la création de la page Facebook de l'événement et son annonce sur la page de la marque, au choix du hashtag – d'autant plus important qu'il n'existe plus que sur Twitter – et la promotion de celui-ci en fonction de la communauté que l'on souhaite créer. « Le dossier de presse préparé tranquillement avant l'événement, qu'on complétait du nombre de visiteurs et des gagnants des concours après, c'est fini. Il faut déjà créer du contenu avant l'event en tant que tel, » remarque Pascal Cauwelier, managing director de Fast Forward. Comme passer par la vidéo, qui explose littéralement ces dernières années. « Les teasers qui peuvent accompagner sur le web les affiches traditionnelles annoncent la promesse de la marque, comme les trailers au cinéma. » Si on pensait au départ que le digital allait alléger le travail, en offrant la possibilité d'envoyer à la dernière minute une infinité d'invitations par mail, en fait « il se rajoute au reste, » remarque Emmanuel Andries, ceo de D-Side Group. « Si on veut assurer de la notoriété, il est nécessaire que l'écosystème soit complet: on combine la presse, l'invitation papier à la relance e-mail, au buzz, à Youtube, Facebook ou Twitter. Mais l'événement doit aussi vite ressortir sur Google, d'où du SEO pour bien le classer, éventuellement compensé par de l'AdWords. Il faut également prévoir les liens vers le site, les différentes pages, etc. Cela rend donc la chose plus complexe, et parfois plus chère, puisqu'il y a une multiplication des messages et des techniques pour que l'événement ressorte dans la masse d'infos qui submerge chacun d'entre-nous quotidiennement. » En revanche, les médias sociaux – Facebook en tête – présentent l'avantage de pouvoir segmenter de manière très précise... offrant ainsi, lors d'une activation plutôt de niche, la possibilité de ne s'adresser qu'à une communauté particulière et donc de (futurs) fans de qualité.

AU-DELÀ DU LIVE

Même rengaine en aval, avec toujours la vidéo au sommet. « Elle est devenue moins chère à produire, avec moins de moyens techniques. L'image est à portée de main, facile à diffuser, facile à regarder, » énumère Emmanuel Andries. Mais parce qu'ils constituent la promotion de la prochaine édition, photos ou films doivent être préparés de manière professionnelle. Du coup, « nous devons faire appel à des photographes, des cameramen, des réalisateurs pros,... qui doivent opérer très rapidement, de façon à ce que parfois tout soit prêt le soir-même. Voyez l'after-movie de Tomorrowland: ce n'est pas du travail d'amateurs! Et c'est cette qualité de communication qui alimente le 'hype' de l'événement, » souligne Pascal Cauwelier. Toutefois, grâce au digital, la collecte des données est beaucoup plus facile et importante. La marque peut continuer à communiquer, partager les présentations d'un event BtoB, personnaliser ses newletters,... Bref, l'événement continue de vivre bien plus longtemps, déborde le réel pour se prolonger dans le virtuel. Mais surtout, « il atteint bien plus de personnes! » souligne Olivier Trop. « Avant, si l'événementiel induisait un contact beaucoup plus fort avec le consommateur, son retentissement était moindre qu'un message diffusé par les médias de masse. Dorénavant, même la plus petite activation ou conférence peut jouir d'un énorme retentissement, dépassant l'audience effectivement présente et les frontières du lieu où elle se passe. »

« L'événement – dans son sens très large – est devenu indissociable des réseaux sociaux parce qu'il produit du contenu pour ces derniers. En fait, les deux se nourrissent mutuellement, » analyse Emmanuel Andries. Encore une fois, pour émerger et apparaitre comme crédible, ce contenu doit être de qualité. « Il doit être chouette dans le fond comme dans la forme, valoir la peine d'être apprécié, pouvoir être facilement visionné ou partagé. » Et de refaire allusion à l'after-movie Tomorrowland – décidément une référence en la matière – qui n'a pas hésité à bloquer la publicité. « Je trouve cependant qu'on exploite pas encore assez le potentiel du 'post-event' pour réaliser un cercle le plus vertueux possible. Il existe encore une poche de développement, comme faire du SEO sur le contenu que l'événement a créé ou continuer à taguer les mots-clés... La communication en amont apporte de la visibilité et de la crédibilité, tant pour les participants que pour les sponsors. Elle sert aussi à montrer à ceux qui ne sont pas venus ce qu'ils ont raté, et à rassurer après-coup ceux qui sont venus qu'ils ont bien fait de faire le déplacement. »

SORTIR DU MODÈLE TOP-DOWN

Le contenu, c'est principalement l'événement lui-même qui le fournit. Reste à le stimuler: « Les gens s'attendent à ce qu'on agisse, réagisse et interagisse sur les réseaux. C'est un outil qui facilite les interventions, comme transmettre la météo, les changements de programme, les mouvements de foule. Il faut donc prévoir une équipe qui réponde... et observe ce qui s'y passe, » détaille Olivier Trop. On ne vous apprend rien: si les médias sociaux offrent une visibilité sans pareille aux événements, ils augmentent aussi considérablement la vitesse de propagation des remarques négatives. « Il faut s'y préparer et se décider sur la posture à adopter, » prévient Pascal Cauwelier. « Avant, c'est la marque qui décidait comment allait se passer l'événement; maintenant que le consommateur a la parole, il peut dire comment il voit la chose. C'est définitivement la fin de la communication top-down pour tout le monde, même dans le secteur de l'événementiel. »

LE DIGITAL FAIT PRENDRE PLUS DE RISQUES. Emmanuel Andries
Cependant, il n'y a pas de recette ou de comportement idéal. « Sensibilisé au fait que le public a dorénavant plus de possibilités de donner un feedback, nous sommes peut-être encore plus attentifs aux décors, à la sécurité, on briefe le personnel, on est très proactifs,.... S'il y a des mécontents, même s'ils représentent une toute petite partie du public, on sait que cela va se savoir, » confie Olivier Trop. Pour les orateurs aussi, la pression se fait davantage ressentir: l'ensemble de l'audience challenge ce qui est exposé, elle peut commenter, vérifier les informations qui sont délivrées... « Si tout le public est occupé à pianoter sur son smartphone, qu'est-ce que cela signifie? Est-ce qu'ils écoutent et cherchent des données supplémentaires? Est-ce qu'ils s'ennuient et font totalement autre chose? » interroge Emmanuel Andries. « Il faut s'y faire. Et adopter un modèles de 'pairs à pairs', de conversation, être le plus transparent possible. »

RÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE

Mais le digital, ce n'est pas uniquement les réseaux sociaux; c'est également toute une série de nouvelles technologies qui viennent enrichir l'événement. Cela commence bien sûr par une excellente connexion wifi, parce que « ce qui a boosté le tout, c'est le mobile! Il inclut la photo, la vidéo et implique un déplacement, ce qui n'était pas le cas avec les laptops, » rappelle Olivier Trop. Et puis, les possibilités sont infinies. « Nous avons développé des outils pour aider à la production événementielle et à l'introduction de contenu, un 'tablet content manager' qui permet au régisseur et au speaker de gérer – simplement avec deux tablettes – un show de contenu et de présentation de haute qualité. Nous avons mis au point des moyens d'interagir avec un environnement virtuel, des caméras, des capteurs sensoriels, des boitiers de voting system, etc. Il y a pléthore d'acteurs en digital et sur le web qui proposent des applications, des services qui peuvent être utiles aux agences événementielles. Et les produits ont tendance à devenir de plus en plus ouverts et peu chers, voire gratuits, » renseigne Emmanuel Andries. « Toute l'évolution du digital et de la vidéo a fondamentalement changé notre métier. Avant, on envoyait des DVD (et, encore avant, des Betamax! ou des disques durs; aujourd'hui, on est full équipé pour envoyer partout dans le monde sur le cloud, en un format au-dessus de la HD. Plus aucun envoi matériel, on peut télécharger de partout. Nous avons désormais accès à une infinité de ressources. On peut dématérialiser, délocaliser. Et ce qui est vrai pour nous, l'est également pour nos clients. »

Autant dire que l'événementiel n'a pas fini d'évoluer. « Pour le moment, on joue encore beaucoup avec les photos et les hashtags, mais les gens commencent doucement à se lasser. Dans les années qui viennent, il ne faudra pas s'arrêter d'être créatifs et trouver d'autres moyens de stimuler le partage, » prévient Pascal Cauwelier. Chose d'autant plus vraie que le public, par le biais du web, a accès à des spectacles toujours plus fantastiques, des idées toujours plus inattendues, des moyens toujours plus grands... Il compare, découvre la concurrence et est toujours plus difficile à impressionner!

DIGITAL DONC MESURABLE?

Le digital a ceci: « Il fait prendre à tout le monde de plus en plus de risques et de last minute. Dans la préparation de l'événement, l'accélération de la transmission de l'information et cet espèce de ping-pong permanent raccourcissent la chaîne de décisions et mène parfois à de moins bons résultats, » éclaircit Emmanuel Andries. « Donc l'espèce de petit credo qui est de dire que le digital est 'quick-cheap-créatif', ça ne fonctionne pas. » Même écho chez Olivier trop: « Avec le digital, c'est du 24/7. Il faut gérer ce côté instantané et il faut les experts pour. Cela ne relève en rien de l'improvisation mais d'une réelle stratégie. »
Quant à la mesure, Emmanuel Andries ne s'en cache pas: « La mesure événementielle reste une grande boîte noire. Le digital permet néanmoins d'obtenir des feedbacks moins structurés, en étudiant les conversations. Les logiciels d'analyse sémantique peuvent fournir de nombreuses infos. » Le conversation manager peut également fournir une évaluation en direct. Puis, « jeter un coup d'oeil aux réflexions des gens donnent des idées. Mais l'évaluation spontanée se fait aussi plus facilement, puisque le public ne doit plus passer par un processus rébarbatif de formulaire à trouver sur le site web, » explique Olivier Trop. Et si le public n'avait bientôt plus grand-chose à faire du tout? Pensez aux bracelets interactifs de Tomorrowland qui, s'ils connectaient deux profils Facebook de participants consentants, permettaient sans doute aussi de suivre le moindre de leurs déplacements. Pascal Cauwelier: « A mon sens, le tracking va prendre de l'ampleur dans le futur. Cela se fait déjà pas mal à l'étranger, avec des portiques de scanning, des bornes. Encore faut-il que l'utilisateur soit d'accord qu'on recueille ses infos... »